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Séance de rattrapage n°6 - Pop-rock

dimanche 19 juin 2011, par Laurent


Pour s’enfiler quelque chose d’un peu plus digeste le week-end, revenons sur quelques disques dont on n’a pas trouvé l’occasion de parler en long et en large. Du coup, autant en parler vite et bien, comme ça vous ne pourrez pas dire qu’on ne vous aura pas prévenus... Alors que l’été fait timidement son retour dans nos contrées, explorons dix albums où rock et pop font bon ménage, pas forcément pour le meilleur d’ailleurs, l’essentiel restant cependant de ne pas bouder son plaisir.


The Airborne Toxic Event – All at Once

On y avait cru. Pas des masses, mais quand même. Avec son premier album, The Airborne Toxic Event proposait un habile cocktail de gravitas pour les stades. Dans son genre, ça le fait toujours, mais en tout pareil et c’est bien ça qui coince. Les cinq minutes de montée en puissance de la plage titulaire ouvrent le disque à l’identique de ce que faisait Sometime Around Midnight il y a deux ans. On retrouve ensuite, en égales proportions, du tube rentre-dedans (Numb, plutôt irrésistible) et des morceaux qui carburent au diesel pour finir en explosion attendue (All for a Woman). Hormis donc quelques surprises positives (le riff de Changing, agréable chinoiserie), on évolue ici dans le domaine du rock tout-terrain de qualité quoiqu’archi-prévisible.


CocknBullKid – Adulthood

Longtemps pressentie comme un des possibles futurs de la pop sur foi de quelques perles balancées via Myspace, l’anglo-ghanéenne Anita Blay a pris tout le temps de se faire oublier avant de présenter son premier album. Sorte de Lily Allen en moins peste et en plus soul, elle aurait manifestement attendu l’âge adulte. Choix mal récompensé, puisque le résultat oscille entre quelques fulgurances imparables (l’ultra groovy Mexico, l’éponyme CocknBullKid, le plaisir coupable I Deserve It) et une majorité de tubes passe-partout qu’elle aurait mieux fait d’offrir à de vieilles divas confirmées, genre une Kylie Minogue perméable à l’humour ou une Madonna à qui il resterait un peu de flair. En version free-lance, Blay ne déshonorera pas davantage sa plume, taillée dans l’ébène dont on fait les jackpots.


Guillemots – Walk the River

Les Guillemots avaient commencé tellement fort qu’on s’est rapidement demandé, par la suite, s’ils n’avaient pas brûlé d’emblée toutes leurs cartouches. Ça n’a pas pour autant empêché leur leader Fyfe Dangerfield de s’offrir l’an dernier une très convaincante escapade solitaire en mode économe. Fort de cette expérience, le groupe revient avec des compos plus immédiates, aux structures classiques et à l’effet régulier (Walk the River, I Must Be a Lover). Cela ne les retient pas de faire parfois trop kitsch (Tigers), trop long (Sometimes I Remember Wrong) ou trop... too much (Ice Room). Yesterday Is Dead, chante Dangerfield sur un morceau de clôture à l’envolée mirifique ; et c’est dommage, car cette formation aujourd’hui dans l’impasse ne peut plus vraiment compter sur de meilleurs lendemains.


Metronomy – The English Riviera

Tiendrait-on le grand album chiant et surfait de 2011 ? Toutes les conditions sont réunies : un leader tête à claques – Joseph Mount – considéré comme un génie barré ; des chansons mollassonnes dont le simplisme voudrait nous faire croire qu’elles se sont abreuvées au grââl pop (She Wants) ; une propension à jouer à touche-pipi avec des synthés Bontempi (The Look, Corinne) quand l’ordre du jour n’est pas à la réhabilitation des musiques d’ascenseur (Some Written). Cela dit, on est fondamentalement plus près d’un Hot Chip qui s’attaquerait à la période disco des Stones – encore que certains seraient capables de trouver l’idée intéressante – sans renier Erasure. Sauvons du naufrage Everything Goes My Way, où la chanteuse des shoegazers Veronica Falls se révèle charmante. À part ça, quelle plaie...


Mona – Mona

J’ai toujours eu un problème avec les jeunes loups aux dents longues : cette prétention arriviste, ce manque d’humilité qui les pousse à se mesurer trop vite à leurs aînés au lieu de faire modestement leurs preuves. Dès Cloak & Dagger, premier titre du premier album de Mona, les ambitions sont affichées au format jumbo : être U2 à la place de U2, sur foi d’un chant affecté qui n’a retenu que les pires moments de Bono (Lean into the Fall), des motifs calqués sur les classiques de The Edge (Say You Will, Shooting the Moon), sans oublier les insupportables « wowo » qui n’ont pas peur de sombrer dans la mélasse 30 Seconds to Mars (Teenager, ben tiens). Quelques trucs potables (Listen to Your Love) ne rachètent pas ce truc bien parti pour être adulé par tous ceux qui aiment U2 pour les mauvaises raisons.


Mother Mother – Eureka

Après le coq et le poisson des précédents albums, les Canadiens ont opté pour la voie féline et une pochette fluo bien placée pour le concours de la plus laide de l’année. Qu’à cela ne tienne : ces gens savent y faire pour torcher des bombinettes power-pop qui ont le mérite d’aller droit au but. La force du groupe étant de toujours réussir à toucher cette immédiateté sans renoncer à y incorporer une dose à peine perceptible d’expérimentation. Sans comparaison aucune, c’était bien là le génie des Beatles, dont la formation de Toronto n’hésite pas à pasticher le Ticket to Ride sur son propre Baby Don’t Dance. Sinon, on pense parfois à leurs compatriotes de Metric, voire à un Robbie Williams découvrant son côté indé tout en assumant pleinement ses penchants glam. Eurêka ! On a trouvé la bande-son des barbecues d’été.


The Pierces – You & I

Les sœurs Pierces ont toujours été mimi tout plein avec leur folk-rock moulé dans le miel, impeccable pour illustrer l’un et l’autre déboires sentimentaux dans quelque série à succès. De l’amertume juvénile à l’arrière-goût de limonade, qui ne les empêche nullement de durcir le ton à l’occasion (le riff de Love You More, le propos de You’ll Be Mine), mais toujours dans les limites du raisonnable. Dans leurs mauvais moments, les frangines sonnent comme Shania Twain (I Will Not Be Forgotten), mais leurs ballades sans prétention lorgnent tout de même plus souvent du côté des doux écorchés vintage comme les Carpenters (We Are Stars) voire les Mamas & Papas (Kissing You Goodbye, hommage manifeste). Contre toute attente, l’ensemble tient remarquablement la route et offre 40 minutes de plaisir sage.


(Please) Don’t Blame Mexico – Concorde

C’est certain, il y a un public pour la catégorie musicale où s’inscrit ce groupe français. On retrouve en effet chez (Please) Don’t Blame Mexico ce qu’on retrouve chez tant d’autres groupes alternatifs d’outre-Quiévrain : une indéniable excellence mélodique, gelée par une malheureuse insuffisance vocale. Déjà que l’accent joue les tue-l’amour, mais en plus c’est chanté avec une telle absence d’émotion qu’on se demande si ces gens en ont quelque chose à carrer. À ce titre, ils rappellent nos Austin Lace et autres Flexa Lyndo, en moins pines d’huître. Cela étant, les chansons sont impeccablement jouées et même si on déplore de n’entendre, dans Michel Foucault Saved My Life, aucune réflexion approfondie sur le panoptisme, on se dit qu’un organe approprié aurait transformé en or ces compos aux petits oignons.


The Unthanks – Last

Depuis que Rachel Unthank a mis son groupe au pluriel – avec sa sœur Becky dans le coup, c’était la moindre des choses – il semble qu’elle en ait quelque peu lissé le propos. Partie du folklore irlandais pour le mêler à des compositions personnelles sur des disques aussi rugueux que sublimes, elle officie aujourd’hui dans une sorte de variété internationale de qualité très très supérieure – on est à mille lieues des Corrs tout de même – mais à laquelle fait sans doute défaut la fougue retenue des premiers enregistrements – en particulier l’indétrônable “The Bairns” – si bien qu’à l’aspect traditionnel s’est substitué un côté simplement vieillot. Dans sa catégorie, “Last” n’en est pas moins un magnifique album pour regarder la pluie fondre sur les prés verts.


Alex Winston – Sister Wife

Agréable au possible, ce mini-album – format au cœur d’un véritable retour en grâce – dévoile les premières armes d’une artisane plutôt douée, mais apparemment très indécise encore quant à son orientation musicale : dans un fond d’indie-rock à tendance galopante viennent se déposer des chansons toutes sucres, ce qui forme un mélange assez familier de méandres et d’évidence, le tout embaumé d’une certaine saveur baroque héritée des eighties, quelque part entre Kate Bush et Cindy Lauper donc (Fingers & Toes). Toutefois, les comparaisons les plus patentes sont moins lointaines et nous ramèneraient à Arcade Fire – plus particulièrement les échappées douces-amères de Régine Chassagne (Locomotive) – voire aux côtés les plus aériens des Dirty Projectors (Sister Wife, Choice Notes). Prometteur.


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5 Messages

  • Séance de rattrapage n°6 - Pop-rock 19 juin 2011 16:21, par hervius

    Laurent,
    Je trouve la critique de Metronomy – The English Riviera sévère. Les singles She Wants et surtout The Look sont tout simplement merveilleux

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    • Séance de rattrapage n°6 - Pop-rock 19 juin 2011 20:07, par Laurent

      Oui je sais, j’y ai été un peu (?) fort quitte à paraître provocant. Mais vraiment, ce disque ne me fait rien du tout, je m’ennuie pratiquement tout du long tellement je trouve ça plat comme une limande. Il faut dire que je m’étais autant ennuyé sur le précédent et que je trouve Hot Chip tout aussi rasoir (dans la mesure où les styles me semblent comparables). Autant la simplicité m’apparaît généralement comme un gage de qualité, autant ici je la trouve au service de rien. Je réécoute The Look (un sacrifice) et j’attends désespérément qu’un truc se passe, mais rien.

      Attention, je n’éprouve aucune once de mépris pour les gens qui aiment ça (je sais combien certains encensent Metronomy et comme une critique de ce genre peut être vexante pour les fans), mais à titre personnel... nada.

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  • Séance de rattrapage n°6 - Pop-rock 20 juin 2011 10:16, par Lionel

    J’avoue qu’une étoile et une critique assez dure... Y me semblerait que le style electro-pop-kitsch-80’s-dansante te sorte par le trou de nez (si pas autre chose...).

    Ça à le mérite d’être modifié au moins pour la production qui est juste parfaite.

    Corinne, The Look, Everything Goes My Way, The Bay, Some Written... Comment s’embêter avec tout ça ?

    Pour pour ma part, je n’ai toujours pas compris She Wants... Je la trouve effectivement aussi mollassonne mais on sent qu’il y a quelque chose de bon la dessous.

    C’est d’une simplicité et d’une douceur qui invite à se déhancher non pas comme le ferait Thom Yorke sur Lotus Flower, mais un petit mouvement des jambes, des claquements de doigts, hochement des épaules de gauches à droite etc...
    Je trouve qu’on arrive à transformer le pop cul-cul en quelque chose de sérieux et de réécoutable.

    Il est clair que Joseph Mount n’a pas le physique avantageux mais je suis en accord avec le génie barré. Il en est déjà à son 3ème album avec Metronomy comme beaucoup semble l’oublier, même les médias, et pour les avoir vu en concert, il faut pouvoir déjà apprécier le second degré sans quoi on se demande si on a pas vu des amateurs de teletubies ou autres bouffonnerie du genre. Le premier album (Pip Paine) était assez expérimental et difficile d’accès, avec un travail sur le son qui se ressentait bien mais sous une production assez dégueulasse. On a pu quand même en tirer quelques perles comme : You Could Easily Have Me (morceau le plus rock du groupe), Black Eye/ Burnt Thumb (morceau le plus balkanique du groupe), Trick or Treatz, 1 String Strung. Je vais me servir de l’album Pip Paine et The Warning de Hot Chip pour te dire que ta comparaison est peut-être justifiable mais trop facile.

    En effet, sur Pip Paine tu peux facilement te rendre compte de l’influence du groupe qui est déjà très rock avec quelques fois un son balkanique et entouré d’une pop assez décalée comparé à un Hot Chip qui était déjà très pop accompagné d’un ton electronic-hip-hop.

    Le 2ème album Nights Out qui est l’album le plus accessible du groupe fut déjà plus pop que le précédent. Mais la moitié des morceaux possède toujours ce côté rock avec cette guitare dégueulasse et toujours ce ptit côté balkanique dans un album qui se veut plus dansant aussi.

    Ayant donc suivi le groupe depuis ces débuts, The English Riviera représente pour moi, l’apogée du groupe. Ils y ont perdu un membre et en on retrouvé deux autres pour faire une pop qui abandonne totalement l’esprit rock et ses guitares crades des anciens albums mais la rythmique de base reste semblable aux précédents albums sauf qu’on remplace korg et autres joujou dansants pour le Roland Juno 60 avec une sphère très plage et surf.

    Pour Some Written, Ok pour le musique d’ascenseur mais... de qualité s’il vous plait ! :)

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    • Séance de rattrapage n°6 - Pop-rock 20 juin 2011 15:27, par Laurent

      Ben... dans "le style electro-pop-kitsch-80’s-dansante", je t’avoue que j’avais encore bien aimé le dernier Alizée... ;D

      Même, d’une manière générale, je me demande si je ne suis pas plus sensible aux prods françaises (Teki Latex a co) dans ce registre. Ça doit être mon côté putassier. ^^

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  • Séance de rattrapage n°6 - Pop-rock 15 novembre 2011 18:44, par nico

    Bon je vais être le 3ème relou à te dire : "Quoi ?! Mais comment peut on penser ça à l’écoute de Metronomy ? Mais t’es ouf !"

    Mais tes critiques étant constructives je vais pas m’étendre... Je vois juste que les 2 précédents commentateurs n’ont pas mentionné "We broke free" (du dernier album), et son intro magique, sa mélodie et son rythme imparables..

    En tout cas si tu devais n’en ré-écouter qu’une je dirais celle là (surtout que Everything goes my way t’as déjà touché), vraiment parfaite (mais faut écouter fort hein !)

    Enfin, pour moi ces mecs sont des génies.. Passer d’une pure électro à de la pop, le tout parsemé de grosses guitares... J’ai rarement vu le Bikini (à Toulouse) aussi plein et aussi apte à danser en masse !

    Voir en ligne : encore !

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