mardi 11 octobre 2011, par
Au plus que, au mieux que
« Here we are now at the middle. More and more, I have the feeling that we are getting nowhere. Slowly, we are getting nowhere... and that is a pleasure. » Voilà par quel soliloque DJ Shadow scinde les deux faces de son nouvel album, entre une première moitié relativement déroutante et une seconde nettement plus familière. Décidément insaisissable, Josh Davis n’a jamais commis qu’une véritable faute : celle d’avoir commencé par la fin. “Endtroducing”, ou comment générer d’emblée des attentes auxquelles il n’avait aucune intention de répondre. Refusant le carcan du seul spleen urbain, DJ Shadow ne s’est en effet fixé aucune barrière par la suite, témoins le génial premier album d’Unkle mais aussi “The Outsider”, disque rongé par une invasion de featurings hip-hop qui avait laissé plus d’un fan sur sa fin... euh... faim.
Que dire alors de ce retour encore une fois très – trop – attendu ? « Moins vous en saurez, mieux ce sera. » Autant vous informer tout de même : le DJ est en plutôt bonne forme et se sent d’humeur bricoleuse, ce qui ne l’empêchera aucunement de prendre la tangente. Avec son gros riff qui tache façon Motörhead, Border Crossing renseigne d’abord sur une réorientation électro-punk. Fausse piste : Stay the Course, en compagnie de Talib Kweli, remet les pendules à l’heure de Flava Flav, old school jusqu’au bout des aiguilles. Alors on va où là ? « I’ve been trying, but I just don’t seem to go nowhere », entend-on ensuite sur une ballade à la Everlast. Pour la cohérence, on repassera : ce quatrième album est bien décidé à nous promener dans toutes les directions. Ceux qui reprochaient à “The Outsider” sa redondance ne pourront en tout cas que saluer ce louable effort de variété.
On n’est pas au bout de nos surprises... Sur Warning Call, Tom Vek semble d’autant plus hors propos qu’il se prend presque pour les Editors, et c’est à l’instant précis où l’on se débouche les oreilles pour s’assurer qu’on est bien en train d’écouter un album de DJ Shadow que le bidouilleur place les titres où son style est le plus reconnaissable : Tedium et Enemy Lines, deux tranches de mélancolie bien garnies. En début de face B, Redeemed y adjoint un chant sensuel qui prolonge la contemplation des orteils. Ces derniers vont pourtant se remettre à remuer dès Run for Your Life, escapade funky dominée par une basse bien ronde et quelques cuivres agités. Assez irrésistible, au même titre que les 6’30 de collages qui font vibrer I Gotta Rokk, cet alléchant signe avant-coureur que le DJ avait laissé transpirer il y a quelques mois.
Quid donc des scratches et des samples vocaux ? Josh Davis nous en a réservé sa part, notamment sur le stressant Give Me Back the Nights, mais surtout sur Circular Logic, diptyque qui se répond en forme d’épanadiplose de l’introduction à la conclusion de l’album. Par ailleurs peu réticent à tenter quelques coups plus pop, DJ Shadow fait comme tout le monde en invitant Little Dragon à cultiver leur coquetterie (Scale It Back), et emprunte ailleurs une voie qui n’est pas étrangère à Moby, quoiqu’en version plus élégante. Sad and Lonely et sa petite sœur (Not So) Sad and Lonely, loin d’une tristesse de façade, forment une complainte qui flirte avec les profondeurs atteintes autrefois par le Cinematic Orchestra. À dresser ainsi l’inventaire exhaustif d’un disque régulièrement surprenant et qui ne compte que des moments agréables, on en sans doute déjà beaucoup trop dit. Mais vu d’ici, après tout, plus vous en savez et mieux on se porte.
Il ne faudra pas beaucoup de temps pour renouer avec Ladytron, quelques secondes ont suffi pour que cette voix et son écho qui maintient un peu de mystère reviennent avec leur charriot de souvenirs (c’est comme un charriot de desserts mais plus nostalgique).
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La permanence dans le changement
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