jeudi 8 novembre 2012, par
Mladic dans l’orage
Cette fois, contrairement à leur dernier passage dans notre pays, il n’y avait pas de dilemme pour aller voir Godspeed You ! Black Emperor.
On vous avait déjà parlé du duo Baby Fire, hébergé par le label Cheap Satanism Records. Mais je n’avais jamais eu l’occasion de les voir en vrai. C’est maintenant chose faite et on ne peut pas dire que je sois complétement retourné. Une formule minimale avec une batteuse et une chanteuse-guitariste peut fonctionner sur album si la nervosité est là. Mais avec une batterie simpliste, une guitare simpliste et des mélodies simplistes, il faut des morceaux accrocheurs, ce qu’ils ne sont pas assez sauf Soap. Je serais curieux d’entendre la chanteuse dans un ’vrai’ groupe plus étoffé, parce que sa voix est et reste le point d’accroche de ses projets toujours arides (rappelez-moi que je vous dois une critique du dernier Keiki).
Je savais qu’un concert de Godspeed You ! black Emperor ne serait pas comme les autres, parce que la formation n’est pas comme les autres. Parler de genre, de post-rock, c’est assez frustre pour définir leur musique, parce qu’elle est un genre à elle toute seule. Amateurs des gimmicks, des mélodies entrainantes, des morceaux catchy et courts, passez votre chemin, vous ne serez pas à la fête. Parce que le groupe de Montréal manipule le son comme une matière brute, comme une fin en soi.
L’introduction, la mise en place des huit protagonistes se fait progressivement, avec un son presque indistinct, un magma d’où émerge lentement le premier morceau. On le reconnait bien vite puisque c’est la pièce maitresse de leur album sorti un peu à la surprise générale cette année. Mladic, puisque c’est de lui qu’il s’agit, procure la première décharge d’adrénaline de la soirée, et une des plus fortes. Godspeed à pleine puissance, c’est un violon, une basse, deux batteries et quatre guitares. Ils ne jouent pas la rupture, la pédale de distorsion enclenchée à l’unisson, mais une implacable montée en groupe, et surtout un maintien au sommet qui étourdit. Le son (très bon et pas exagérément fort) est partout, et on est littéralement happés par ce vrombissement organique.
Le concert durera deux heures. Ce qui contient un bon nombre de passages lents, de drone étiré, de moments où l’attention s’échappe. Mais pas la fascination, pas le respect énorme, pas la sensation de vivre une expérience. Évidemment, il y a peu de point d’accroche à cette musique dont on n’attend aucun tube radiophonique, aucune interaction avec le groupe soudé mais fermé sur lui-même (comme prévu). Et après une heure et demi, on reconnait un son de guitare, celui du terrifiant East Hastings, cette promesse toujours tenue d’une mâchoire qui pend. On sait que ce sera le bouquet final, l’explosion définitive, le second gros rush de palpitations dans l’échine. On le sait et ça arrive. Et puis l’orage se dissipe, petit à petit, un feedback de guitare après l’autre, ils font un petit signe de la main, la lumière se rallume, on sort. Il ne reste plus qu’à rentrer en écoutant God Bless Our Dead Marines de leurs amis Silver Mt Zion.
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