lundi 22 septembre 2014, par
C’est toujours la même histoire. La façon dont on a découvert un artiste conditionne le regard qu’on a sur lui par la suite. Par exemple, sur la foi de l’album de Clogs et d’All Things Will Unwind, je prenais Shara Worden pour la chanteuse de garde dès qu’un artiste avait besoin d’assouvir une nostalgie du bel canto.
La modernité de cet album m’a donc logiquement paru incongrue lors des premières écoutes. Or c’est elle, alliée à la voix de Shara Worden qui fait de cet album une bien belle surprise. Créatrice de musique au même titre qu’un Andrew Bird, Worden trouve ici un bel équilibre.
Evidemment, ses performances vocales sont toujours à l’avant-plan mais sans esbroufe ni démonstration excessive. Peu de chanteuses peuvent lancer d’une note Looking At The Sun. Mais cette technique est surtout au service de morceaux forts. This Is My Hand monte bien, prend une épaisseur de bon morceau de pop froide et faussement distante avec une belle pulsation. Elle suit le tempo sans jamais donner l’impression de se presser sue le beau et puissant Before The Words.
Il y a finalement peu de chanteuses qui peuvent passer outre leur technique pour livrer une musique aventureuse et dense. On pense à Roisin Murphy au temps de Ruby Blue (Lover/Killer) ou à St Vincent (I’m Not The Bad Guy avec sa basse que ne renierait pas Spoon).
Il y a un peu de mélancolie là-dedans et ce mélange chaud/froid est assez réussi (comme chez les deux artistes citées). Seule source de frustration, tous les morceaux percutants, sont placés d’emblée, comme si elle avait voulu livrer une face ‘A’ et une face ‘B’. Répartir plus équitablement les hauts faits et le reste aurait aidé à avoir une meilleure perception moyenne. So Easy peine à passionner et le vrombissant Shape est un peu plus mou.
Mais c’est du pinaillage. Shara Worden vient de sortir un album fort, et profite de sa voix exceptionnelle pour donner sa vision de la musique moderne.
On vous avait déjà parlé de musiques de films, de séries, de documentaires, de spectacles de danse, d’installations et même de restaurants, on inaugure la musique de cirque. Dans le genre, difficile de faire plus raccord que le premier album de Beirut avec ses cuivres balkaniques. Mais le temps a passé et Zach Condon a consacré énormément d’efforts à sortir ce cet étroit carcan musical. Et ce (…)
Depuis eux albums, Cross Record est le projet solo d’Emily Cross. Chanteuse de Loma, elle agit aussi en tant que ‘Death Doula’, autrement dit en assistant des fins de vie. Elle a aussi quitté son Texas pour le Dorset et est devenue mère, ce qui ne doit pas être un mince ajustement. Donc quand on décèle que c’est une chanteuse habitée, tout ce substrat prend son sens, prend chair même. (…)
Comme un Perfume Genius qui a émergé à la même époque, Trevor Powers est passé de petit génie de la bedroom pop intime à singer/songwriter aux possibilités pas encore complétement cernées. Le point de départ de cet album est la découverte d’anciennes vidéos de son enfance retrouvées dans la cave de ses parents. C’est pourquoi on entend beaucoup d’extraits de vidéos, de conversations. (…)
Il y a des artistes qu’on côtoie depuis très longtemps, dont l’excellence semble tellement aller de soi qu’on est surpris qu’ils arrivent à se surpasser. On la savait sociétaire d’un genre en soi dont d’autres membres seraient Angel Olsen ou Emily Jane White, voire Bat For Lashes. De fortes personnalités à n’en pas douter. Mais sur cet album, le ton est bien plus rentre-dedans que chez ses (…)