Accueil > Critiques > 2015

Mount Eerie - Sauna

lundi 23 février 2015, par marc


Sans doute que si on tentait le recensement, on se rendrait compte que toutes les fusions et mélanges de styles musicaux ont déjà été réalisés. Mais le style n’est pas qu’une question combinatoire. Phil Elverum est un héros discret qui a réussi non pas une hybridation à la cosaque, mais un subtil assemblage qui prend corps.

Sur son fantastique duo d’albums Ocean Roar et Clear Moon, le choc produit entre son chant délicat et un impressionnant mur du son organique et compact fonctionnait en plein, avec quelques morceaux de bravoure à la clé.

Assez logiquement, on retrouve à des degrés divers les composantes de ce style, lequel trouve encore quelques grands morceaux pour s’incarner. Emptiness est (paradoxalement) bien plein, avec comme on aime un son lourd, lent, puissant et tendu, le tout supporté par une progression d’accords bien lisible.

Par rapport aux albums qui nous avaient tellement surpris, il y en a moins de constance, diluant forcément l’intérêt, forçant l’auditeur à faire sa sélection. Dans les réussites donc on ajoutera un Boat assez spectaculaire parce qu’abordé à un rythme plus élevé qui permet à toute la mélancolie de la mélodie (oui, il y en a) de sourdre. Comme souvent, c’est la qualité de l’écriture qui fera la différence. Turmoil par exemple pourrait très bien se contenter d’un traitement acoustique. On le savait, cette couche de son n’est pas là pour noyer les morceaux mais pour les emmener ailleurs. Le changement de braquet de Youth fonctionne aussi plutôt bien.

On l’a dit, il faut aussi reconnaitre que certains morceaux nous font trouver le temps long. Spring peine à fasciner sur la longueur, lasse même. Les voix féminines en apesanteur de Dragon ne l’empêchent pas de se trainer, par manque d’intensité supérieure. La voix légère d’Elverum qui présente encore un très bon contrepoint mais semble un peu plus empruntée. Certes, il n’utilise presque plus le vocoder, élément typique de Pre-Human Ideas.

Le style de Mount Eerie reste unique et fascinant. Seulement, on manque sur ce Sauna des rushes d’adrénaline qui propulsaient les grands morceaux du dyptique de 2012. Son écoute en devient assez inégale alors qu’on avait été d’emblée plongé dans un univers fascinant et singulier. Il n’en reste pas moins que dans ses bons moments toujours là, on se rappelle pourquoi on a tant envie de suivre Phil Elverum.

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

  • HEALTH - RAT WARS

    Même après des années passées à autre chose (des musiques de film, des versions disco), la puissance de feu d’HEALTH a laissé une trace manifeste. Mais il a fallu un rabatteur de qualité pour qu’on ne passe pas à côté de cet album. Le souvenir bien qu’ancien était toujours cuisant et on retrouve le trio avec un plaisir certain.
    Ils ont collaboré avec Nine Inch Nails ou Xiu Xiu et ces cousinages semblent (...)

  • Beirut – Hadsel

    Bien honnêtement, quand on a découvert Beirut en 2006, on ne se doutait pas qu’on allait suivre le jeune Zach Condon pendant plus de 17 ans. Cette musique fortement influencée par les fanfares balkaniques a suscité d’emblée l’intérêt mais le procédé semblait trop étriqué pour s’inscrire dans la longueur. On avait tort, forcément, et ceci en est un nouveau rappel.
    En première écoute, ce Hadsel est plutôt en (...)

  • Animal Collective – Isn’t It Now ?

    A une époque où la modernité n’est plus une vertu cardinale, il peut être étonnant de retrouver cette conjonction de talents (Avey Tare, Panda Bear, Deakin et Geologist) aussi en forme après près d’un quart de siècle d’existence. Avec Time Skiffs, on pouvait clairement parler d’une nouvelle période pour le groupe, un revirement vers plus de musique ‘figurative’ par opposition aux brillants collages (...)

  • Caleb Nichols - Let’s Look Back

    L’artiste qui aura fait le plus parler de lui en 16 mois est un prix qui ne rapporte rien sinon des critiques multiples et sans doute un peu de confusion de la part d’un lectorat débordé. Bref, après avoir pris congé de Soft People, l’actif Caleb nous a donné un album un opéra rock Beatles queer puis deux EP qui mélangeaient chansons et poèmes autour du personnage semi-autobiographique de Chantal. Sa (...)