samedi 24 décembre 2016, par
En cette année 2016, tarder à publier une critique pouvait la transformer en nécrologie. Ça a été le cas en janvier pour David Bowie et c’est le même cas de figure pour Léonard Cohen. De plus, ce sont deux artistes que j’ai admiré et adoré qui s’en sont allés. Pour terminer le rapprochement, leurs avant-derniers albums n’étaient pas à la hauteur de leur réputation mais ils ont tous deux terminé sur une note sublime. Aux côtés de Blackstar figurera donc You Want It Darker au panthéon des albums de 2016.
Et de toutes les années aussi si vous voulez mon avis, tant cet album prend toutes les allures du classique, et son ton presque posthume fait résonner quelques-unes des fulgurances en fournissant d’inévitables frissons. Parce qu’avec un tout petit peu de recul, impossible de ne pas comprendre la profondeur presque littérale du I’m ready My Lord qu’il déclare d’emblée sur la plage titulaire. Et c’est l’écho douloureux au God, I’m not ready de Vic Chestnutt quelques semaines avant sa disparition qui nous terrasse complètement.
Léonard Cohen, c’était aussi une voix, et voix, qui chante moins qu’elle ne déclame, et elle n’a jamais semblé aussi posée, aussi chaude, aussi évocatrice. Mais si elles ne sont qu’évoquées, ces mélodies peuvent se révéler magnifiques (Treaty), s’ajoutant à une longue série d’inoubliables. Cet album fournira des perles aux inévitables best-of qui devraient fleurir bientôt. Ce Treaty évidemment mais aussi des slows sans complexe (If I didn’t Have Your love) parce qu’on ne doit plus en avoir à 82 ans.
En tous cas, une vraie preuve de qualité est de voir à quelle vitesse ces morceaux s’imposent, avec quelle facilité ils donnent l’impression d’être là depuis longtemps. On retrouve évidemment plusieurs de ses habitudes musicales. Celles qu’on a acceptées parce qu’elles étaient inhérentes à ses morceaux comme les chœurs féminins d’On The Level. On se rappelle qu’ils tenaient aussi les avant-postes sur Nevermind, magnifique morceau de générique de la sous-estimée saison 2 de True Detective.
Mais sa simplicité est toujours souveraine, comme le prouve la conjonction de chœurs et de violon sur It Seemed the Better Way, les violons déchirants malgré eux de la reprise de Treaty.
Il faut être honnête, on se serait contenté d’un album digne de la part d’un artiste dont la carrière est suffisamment éloquente pour ne pas appeler de suite. On n’en apprécie que mieux cette bonne habitude prise par les artistes essentiels d’offrir une épitaphe sublime, avec plusieurs possibilités de mot de la fin.
I’m travelling light
It’s au revoir
Only one of us was real
And that was me
I’m leaving the table
I’m out of the game
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