Accueil > Critiques > 2017

Volin - Volcan

vendredi 8 septembre 2017, par marc


En chanson française, il y a ceux qui tracent leur propre route, sans vraiment se soucier de références françaises ou autres (Dominique A, Albin de la Simone) mais il arrive aussi qu’il y ait des références américaines assumées mais elles sont plutôt rock (Francis Cabrel, Jean-Louis Murat, on ne va pas évoquer les Vieilles Canailles non plus) et souvent anciennes. La voie suivie par Volin est radicalement différente.

Certes, il est d’autres artistes qui s’abreuvent à la même source d’un indie américain de pointe (Baden Baden, quelques irréductibles Canadiens comme Malajubeou Karkwa) mais c’est encore plus poussé ici, avec une réussite plus manifeste. Le son de guitare, ses soubresauts rappellent ainsi plus Grizzly Bear ou The Antlers (Mes Nuits Sonnent Faux). Cette inclination s’incarne notamment sur le lancinant Canon qui nous accroche d’emblée par des riffs tourbillonnants et ne nous lâche plus, atteignant le potentiel d’exultation des deux exemples. Ils sont aussi fort convaincants sur le tendu Nuit de Glace. Ce sont ces deux morceaux qui montrent à quel point l’hybridation peut être convaincante.

C’est le son et le ton des guitares (et de la section rythmique jamais plan-plan) du trio montpelliérain qui sont originaux, pas l’emploi d’une langue parlée par 274 millions de personnes (source OIF). Ceci passerait-il mieux en anglais ? Peut-être. Ou pas, là n’est pas la question. Certains Français sont suffisamment à l’aise avec l’usage de leur langue que toutes les possibilités musicales s’offrent à eux, et c’est le message principal. La voix, assez caractéristique, assez orientée chanson française est parfois proche de Florent Marchet (Il Ne Me Reste) même si le lyrisme est radicalement différent et l’emphase bien plus marquée.

Outre les deux sommets susmentionnés, ils ne jouent pas la sécurité avec le dense et profond Secousses. C’est dans ce genre de morceau qui s’éloigne très nettement des canons ‘chansons’, comme Hors de Portée qui part sur un beat, Mes Nuits Sonnent Faux qui se renforcent de cordes ou La Tête Haute qui se densifie.

Un album n’est pas bon parce que son idée est bonne, mais parce que les chansons le sont. Le plus important au fond, c’est que Volin nous gratifie de titres vraiment forts. Qu’ils se distinguent du genre auquel elles émargent est finalement accessoire. Vous écoutez et on en reparle ?

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

5 Messages

  • Volin - Volcan 11 septembre 2017 17:08, par Laurent

    Ça m’a régulièrement fait penser à Arman Méliès pour l’intensité, mais plus globalement j’ai surtout eu l’impression de replonger dans les années 90 au festival de Dour, à une époque où se distinguaient divers groupes de rock français crédibles. Le son de ces gars-ci alterne entre ce côté vintage et des moments effectivement plus proches des références américaines citées. Une belle découverte en tout cas, j’attends de voir ce que diront les écoutes suivantes !

    repondre message

    • Volin - Volcan 14 septembre 2017 14:40, par Marc

      Je dois bien avouer que je connais fort peu Arman Méliès. A quels groupes des années ’90 penses-tu ? J’espère que les écoutes suivantes ont confirmé la bonne impression en tous cas !

      repondre message

      • Volin - Volcan 14 septembre 2017 16:35, par Laurent

        Deuxième écoute et oui, j’aime bien j’aime bien !

        Quant aux références, j’évoquais surtout un plongeon impressionniste dans une époque et une ambiance, des sonorités moins léchées qu’aujourd’hui. Je pensais majoritairement à des groupes français qui chantaient en anglais, il y en avait quelques-uns (c’était avant la loi Toubon) mais je me rappelle tout au plus des Thugs, vaguement de Sloy, de So... les francophones étaient un peu moins crédibles même si pour moi ça baigne dans le même océan de souvenirs (la comparaison n’est pas toujours flatteuse mais je pourrais citer Daran, Dolly, dans le meilleur des cas Diabologum). Ce côté vintage, je disais, mais présent seulement sur quelques morceaux.

        Sinon, Arman Méliès je conseille. Écoute "Constamment Je Brûle" du dernier album et le reste devrait couler de source (allez, pour la route : sa reprise d’ "Amoureux Solitaires est à tomber aussi).

        repondre message

        • Volin - Volcan 29 septembre 2017 14:11, par Marc

          Bon, il se confirme que j’ai raté le coche avec Arman Mélies, c’est en effet proche dans l’intention et le résultat.

          Je vois bien cette époque, où on imaginait qu’on allait passer du temps avec Diabologum et où on ne pensait pas encore que Dyonisos ne tenait pas la route deux secondes. Sinon, ils ont passé Larusso au bon disque ce matin...

          repondre message

          • Volin - Volcan 26 mars 2020 19:22, par Benoît Pontegnie

            Pas éloigné d’Arman Mélies effectivement. Son morceau "Dora" devrait te donner le frisson ... aussi.
            Il en est déjà à son 6ème album si jamais.

            repondre message

  • Jeanne Cherhal - Jeanne

    Jeanne Cherhal est une chanteuse moderne. Elle n’a en tous cas jamais reculé devant la dualité entre chansons d’amour et chansons sur la condition féminine, on ne décèle ici aucune déviation de sa trajectoire en la matière. Paradoxalement, c’est le conseil mal informé d’un exécutif de maison de disque qui lui a suggéré que ça pourrait être pas mal, pour elle, d’écrire des chansons féministes (…)

  • Nicolas Jules – Rock ’n Roll Marabout

    “Un disque de rock’n’roll en solo. Tout comme le chanteur sur la pochette n’est pas Chuck Berry, l’oiseau n’est pas un marabout mais un jabiru d’Amérique.”
    Même la lacunaire introduction est du Nicolas Jules pur jus, ça ne change pas. Ce qui change, et c’est une excellente nouvelle c’est que ses albums sont disponibles sur Bandcamp, qui reste une façon efficace de soutenir les artistes et (…)

  • Albin de la Simone - mes battements/Toi Là-Bas

    Normalement, on se concentre exclusivement sur l’aspect musical des choses. Même les musiques de film, série ou danse sont vues pas le simple prisme auditif. On va faire une exception ici parce qu’on l’a lu, Mes Battements d’Albin de la Simone. Et on a bien fait tant c’est un bonheur de sincérité et d’humour. Ce sont des anecdotes, un peu, des histoires courtes, des instantanés écrits et (…)

  • The Imaginary Suitcase – A Chaotic Routine (EP)

    Oui, les choses changent, même pour les compagnons musicaux de longue date. Et même après une dizaine d’oeuvres relatées ici, on constate ce changement dès la pochette. On passera sur le changement de police de caractère pour se concentrer sur les visages, présents pour la première fois. Et puis constater que Laurent Leemans n’est plus seul à bord, même si les autres noms ne sont pas (…)

  • Painting - Snapshot of Pure Attention

    Le truc du trio allemand Painting, c’est de l’art-rock anguleux dans la lignée de choses comme Deerhoofou Architecture in Helsinki (désolé pour les références pas neuves). Et oui, c’est un genre qu’on apprécie toujours (pas trop Deerhoof pourtant, allez comprendre) surtout quand il est défendu avec autant de verve.
    Basé sur l’idée d’une AI qui prendrait ’vie’ et revendiquerait son identité, (…)

  • Eilis Frawley - Fall Forward

    Certains albums résistent. Non pas à l’écoute, celui-ci nous accompagne depuis trois mois. Mais à l’analyse. Leur fluidité n’aide pas le critique. Mais sera appréciée par l’auditeur, on vous le garantit. Eilis Frawley est une batteuse à la base, notamment au sein de Kara Delik dont on vous reparle prochainement. C’est manifeste au détour de morceaux comme People qui s’articule autour de cette (…)

  • Ventura - Superheld

    C’est sans doute une contradiction, mais on peut conserver un excellent souvenir d’un album ancien tout en confessant avoir loupé ses successeurs. Heureusement, le hasard (et les distributeurs) sont là pour nous remettre sur le droit chemin. Issu d’une scène suisse dont on ne cesse de (re)découvrir la profondeur, ce groupe de Lausanne nous offre une nouvelle expérience sonore.
    On avait (…)

  • Gina Eté - Prosopagnosia

    How come you, too, assume your opinion counts ?
    Si cette phrase eut être rude si elle est adressée à un critique du dimanche comme votre serviteur, il prend une autre dimension quand il traite du droit des femmes à disposer de leur corps. Parce que chez la Suissesse Gina Eté, le fond est consubstantiel de la forme. Et cette forme prend encore de la hauteur après un premier EP et un album qui (…)