vendredi 18 juin 2021, par
Il y a souvent une distance entre les aspirations et le résultat. Le Français qui se cache sous le patronyme de Corps Météore revendique la double influence de Peter Gabriel et Michel Berger. Si on dénote une certaine dualité, elle ne va ni dans le sens d’un rock ampoulé ni d’un groove automatique. Par contre, on retrouve une très fréquente inclination hexagonale qui balance entre une tentation de groove et une intimité plus délicate.
On retrouve ces deux pôles ici et ils sont très bien exploités. Danser ou Qu’As-Tu Fait de Moi ? sont donc clairement de la première tendance et il faut reconnaître que ça claque, que ça enlève cet EP. Mais c’est peut-être Au Clair De La Lune est ce qui marque le plus ici. Si la voix nous fait étrangement penser à Jeronimo, il prouve qu’il sait mettre une chanson en évidence, tirer le meilleur de son potentiel. Et c’est beau, tout simplement.
On voit déjà en 5 titres les possibilités d’un artiste. C’est cette amplitude, ce balancement entre deux pôles intime et dansant qui donne le plus d’espoir. Notez donc ce nom.
Il est remarquable de voir à quel point l’image peut être source d’inspiration pour la musique. Dans le cas qui nous occupe, le multi-instrumentiste rennais Ô Lake a composé un album entier inspiré par le film Gerry de Gus Van Sant. Comme souvent dans ces cas-là, on va se contenter de commenter le son sans les images.
Et le résultat est instantanément beau, apaisé, le prototype même de ce qui s’écoute souvent sans qu’une pensée critique ne puisse naître, ce qui n’est nullement une objection. Les lignes mélodiques de clavier s’entrecroisent, se superposent sur un lit de cordes (joli Gerry’s Theme), distillant ampleur et recueillement (Do You Wanna Help) et pouvant même se faire entêtant (Desert). En somme, un album qui peut se faire la bande-son de ce que vous voulez, et c’est très bien comme ça.
Le quintette italien mené pa rle bergamasque Filippo Sala pratique un rock instrumental subtil, un peu post-rock sur les bords, ce qui est un terrain très fréquenté par les groupes dont on parle ici. On va donc tenter de trouver ce qui les distingue ou dans quels horizons ils se situent.
On signale tout d’abod un peu d’électronique, une rythmique plutôt légère. On se dit aussi que les gros sons de synthés seventies constituent une mode bien ancrée (Temel&Toplum) mais relevée d’une battement bien moderne, d’une pulsation jazz vraiment plaisante. Et puis les variations de rythme sont abruptes mais pas dissonantes. Ou elles peuvent volontairement jouer de l’effet de surprise (Bizarre Secret). Time Lapse est plus mystérieux, plus entêtant aussi, élargissant leur spectre et rendant l’écoute intégrale bien revigorante.
Comme pour mieux brouiller les pistes, il y a une voix qui éructe sur Flipper. C’est bien placé quand d’habitude on a droit à une voix éthérée plaquée en fin de composition. On en retrouve une plus subtile, presque chuchotée sur le chouettement psychédélique Fine Final. Pas à dire, ils connaissent leur boulot, la compétence est ce qui saute au yeux immédiatement. Jazz, psychédélisme, post-rock, rien n’effraie le quintette italien qui livre ici un solide et envoûtant album.