Accueil > Critiques > 2024

Godspeed You ! Black Emperor - No Title as of 13 February 2024 28,340 Dead

lundi 28 octobre 2024, par marc


La musique, ce n’est pas seulement ce qu’on entend, c’est aussi ce que l’on projette. Fort de cet adage un peu ampoulé, on peut admettre que de la musique instrumentale puisse avoir un contenu politique. Et les Canadiens de Godspeed You ! Black Emperor en connaissent un rayon en la matière. Leur huitième album n’est pas tellement un cri de révolte ou un appel à la paix inenvisageable à l’heure de boucler ces mots, juste un constat de nausée. Ces sentiments sont réels, ils doivent s’exprimer aussi.

Un son de guitare d’Ephrim Menuck donne la coloration de l’album. On pense à celui de David Gilmour sur un morceau comme Sorrow. A priori deux mondes étanches mais qui le temps d’un riff terrifiant se rejoignent.

Terrifiant certes, mais gratifiant aussi. Comme en témoignent les montées placides sur BABYS IN A THUNDERCLOUD, morceau qui vrille tout de même. Pas de recherche de transcendance ici, mais on trouve tout de même un exutoire, ce qui est presque le principal. Le calme qui revient peut aussi être de l’apaisement, certes, mais aussi de la désolation. Plus que jamais, c’est l’affect qui décide. Tout comme il pourra juger poignants les virages mélancoliques de PALE SPECTATOR TAKES PHOTOS qui est l’autre grand moment de cet album.

Cet album qu’on a d’abord vu comme une plaine désolée finit par emporter une adhésion à presque tout, une fois qu’on s’est épanché sur RAINDROPS CAST IN LEAD et sa lente et inexorable montée. Et puis il y a l’ampleur certaine de GREY RUBBLE – GREEN SHOOTING.

Même s’il s’agit de musique instrumentale, on n’entre pas dans un album comme celui-ci avec comme but d’avoir un plaisant tapis sonore. C’est envisageable évidemment, mais ce serait passer à côté du message. Lequel passe par la musique, pas des mots engagés. Et le résultat est ce mélange complexe de terreur et d’euphorie qui prouve que non, le groupe canadien ne ressemble à aucun autre.

the old world order barely pretended to care.
this new century will be crueler still.
war is coming.
don’t give up.
pick a side.
hang on.
love.
GY !BE

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

  • Endless Dive – Souvenances

    On ne va pas tourner autour du pot, si vous tenez à apposer une étiquette sur votre flacon d’Endless Dive, celle de post-rock adhèrera. Mais on est clairement à la limite du genre, avec une vraie personnalité qui dévie souvent vers le folktronica. Il faut dire que le ton très fortement mélancolique est encore augmenté par des incrustations de sons et dialogues fixés sur VHS ou cassette, voire (…)

  • Mogwai – The Bad Fire

    Si Mogwai est un des premiers noms qui vient à l’esprit quand on parle de post-rock, ils en ont abandonné bien des recettes il y a fort longtemps. C’est sans doute cette volonté d’évolution, certes mesurée mais constante qui leur permet ces 30 ans d’existence déjà et de nous gratifier d’un onzième album.
    Une constante, c’est leur amour du titre tordu, sans doute des private jokes opaques (…)

  • Explosions in the Sky – American Primeval (Soundtrack)

    Les groupes indés dont on parle ici ont parfois l’occasion d’arrondir leurs fins de mois en plaçant un morceau ou l’autre dans une œuvre audiovisuelle. Pour les groupes de post-rock, le potentiel est encore plus grand. Outre ceux qui placent un titre comme la très belle utilisation de East Hastings de Godspeed You ! Black Emperor - No Title as of 13 February 2024 28,340 Dead dans Under the (…)

  • Wyatt E - amāru ultu qereb ziqquratu Part 1

    Le style, les ambiances de Wyatt E. étaient déjà connues et on les retrouve toujours avec autant de plaisir. A la lisière de choses connues (post-rock, doom), ils ont toujours su ajouter une touche personnelle. Il existe des exemples de post-rock avec des ambiances proche-orientales. Citons Esmerine ou Oiseaux-Tempête mais ceci a une coloration différente. L’ambition est d’explorer l’ancienne (…)