vendredi 18 mars 2011, par
Formation serrée
Il arrive toujours un moment où on doit regrouper ses notes, prendre des bouts de phrases épars et en faire un article digne de ce nom. Enfin, qui ressemble à un texte quoi. J’attends souvent ce moment-là pour glaner des informations sur l’artiste, histoire de ne pas vous raconter n’importe quoi. C’est souvent instructif, et donne parfois un éclairage nouveau à ce qu’on pensait dire. Dans le cas du très jeune Norvégien Einar Stray (je pensais jusqu’il y a quelques minutes qu’il était Suédois mais bon…), je vois qu’il a déjà sorti un EP avec Moddi pour qui Laurent ne cachait pas son enthousiasme. Ça me fait une intro un peu longue mais assure une certaine continuité entre les articles.
Vous ne vous en sortirez pas comme ça. Je croule sous les découvertes pour le moment, il n’y a aucune raison que vous y échappiez. Celui-ci fait partie de la caste des artistes doués et luxuriants. Sufjan Stevens est donc une figure tutélaire inévitable et les chœurs y ramènent immanquablement, de même que l’ampleur du paysage sonore. Comme le maitre de l’Illinois, la peur du kitsch n’est pas un frein crédible et je sors un peu lessivé par tant de panache, de volonté de grandeur. Mais il est difficile de ne pas être admiratif devant l’intensité folle d’un We Were The Core Seeds quand un piano seul appuie les voix en retrait sur un morceau qui fourmille d’idées pour s’arrêter et repartir. Tout au long de l’album, il ne se dépare pourtant jamais d’une ligne directrice, la basse étant toujours là pour empêcher toute incursion non désirée dans le côté obscur.
Les plages s’étendent (trois des sept passent la barre des sept minutes), c’est donc de la musique qui prend son temps pour se dérouler, et donc qui réclame de l’auditeur qu’il en fasse de même, quitte à lasser un peu si cet auditeur n’est pas d’humeur jouasse. C’est qu’il faut laisser les morceaux percoler, et leur richesse n’est pas toujours leur meilleur allié. Le premier morceau semble ainsi ne jamais vouloir finir, comme un film dont on voit se succéder les scènes finales pour finalement annoncer une suite. Il faut donc aimer ce petit goût de trop, où les cuivres ne se déplacent pas seuls mais en formation serrée (Caressed), où le chant est un sport collectif, où une pointe de shoegaze peut conclure un morceau (Arrows qui a son petit air de Jonsi). Pourtant, malgré un chant maitrisé (il y a aussi une chanteuse tout à fait en place), je préfère les passages instrumentaux.
Et le seul morceau purement instrumental est une vraie réussite. C’est Teppet Faller et son piano qui s’ébroue dans un nuage de cordes. L’exercice est très beau parce que de ce qui peut s’apparenter à une forme de chaos évolue en explosion mélodique. On tient sans doute là une pièce majeure, un de ces morceaux qui résistera à la multiplication des écoutes. En tous cas, le prétendant au titre de meilleur morceau de l’année devra être meilleur que celui-ci. Bonne chance à ceux qui tenteront leur chance face à ce genre de Godspeed qui aurait remplacé la noirceur chaotique par une savante maitrise.
On en finira donc jamais de découvrir des talents scandinaves. Si on admet qu’en faire trop est une discipline en soi, on tient sans doute un performeur de premier ordre. Trop d’ambition peut épuiser, évidemment, et l’écoute intégrale réclame une partie de bonne volonté, mais il m’est impossible de ne pas reconnaître qu’on a affaire ici à un très grand talent, et que le morceau final à lui seul vaut le déplacement.
www.myspace.com/einarstraymusic
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