vendredi 23 novembre 2012, par
Il est des nôtres
Le monde de Bob Dylan a ses propres références, et des ramifications qu’on ne soupçonnait pas, créant des connivences parfois surprenantes. Un film comme I’m Not There n’est pas intelligible si on n’a pas au préalable les reportages Don’t Look Back de de Pennebaker et Feels Like Going Home de Martin Scorsese. De même, l’appréhension de cet album de reprises ne sera pas la même si on découvre l’œuvre du Zim’ ou si on connait par cœur les versions originales. La lecture de la liste des titres laisse d’ailleurs une drôle d’impression, avec des titres familiers mais qui sonnent étrangement en français.
Cabrel n’en fait pas de mystère, c’est évidemment un projet qui lui tenait à cœur depuis longtemps, mais il avoue que c’est une panne d’inspiration qui l’a poussé vers ses premières amours. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois qu’il tente l’exercice, il figure déjà deux adaptations sur ses albums récents, S’abriter De l’orage et Elle m’appartient. Selon lui, il a voulu se tester sur All Along The Watchtower avant d’aller plus loin. C’est un choix ambitieux parce que non seulement c’est un morceau plus court, simple (trois accords en tout…) et nerveux, mais il y a déjà des exemples brillants de refontes musicales (la plus célèbre étant de Jimi Hendrix, rien que ça). Disons-le tout de suite, c’est une des meilleures surprises ici, et le côté ‘observation du monde’ a sans doute influencé le méridional. Il y a ici un petit gimmick, et une intensité musicale un peu supérieure. Tant qu’on parle des arrangements d’ailleurs, ils sont très sages, sobres, propres et sans bavure, et plus constants que ne le sont ceux des versions originales, dont l’enregistrement s’étire sur 25 ans.
La discographie de Bob Dylan est gigantesque et touffue, et on ne retrouve ici que peu de morceaux emblématiques, à part le single Comme Une Femme (Just Like A Woman) et Je Te Veux (en plus d’All Along The Watchtower bien évidemment). I Want You est sans doute un des titres que je préfère au monde, qui me fait toujours un effet dingue. Ne pas avoir à rougir de cette version est donc une performance. Au lieu des incontournables, il est vraiment allé puiser partout, faisant logiquement la part belle aux années soixante. On retrouve donc des morceaux inédits, seulement présents sur des compilations ou autres bootlegs (qui à eux seuls pourraient constituer une carrière passionnante). Et ce n’est pas plus mal, parce que les versions originales en sont moins usées. Bob Dylan est aussi connu pour ce que d’autres ont fait de ses chansons, parfois avec un succès commercial que lui seul n’aurait peut-être pas pu apporter (pensons aux Byrds, à Manfred Mann, à Johnny Cash). Francis Cabrel s’inscrit dans cette ambitieuse filiation avec humilité et son amour des choses bien faites.
Transposer un univers aussi poétique et volontiers obscur comme celui de Dylan dans une langue qui ne fonctionne pas de la même façon impose de retravailler La tradition de la traduction est bien établie, si on veut se souvenir que bien des artistes français des années 60-70 se sont contentés de fournir des versions plus mièvres de morceaux anglo-saxons. En termes dylanniens, c’est Hughes Auffray ou Graeme Albright qui étaient arrivés à complétement dénaturer l’artiste en en faisant ressortir d’inédits aspects boy-scouts, quitte à perdre de vue le propos originel, bien plus allusif. Evidemment, le résultat n’est pas le même ici. Le constant recours aux images, les phrases chargées, les mélodies parfois simples, tout est un piège potentiel. Et parfois, évidemment, on est plus déconcertés que ravis par Quinn L’Esquimau, mais la simplicité mélancolique de Simple Twist Of Fate reste patente.
Certains morceaux sont plus descriptifs, plus ancrés dans la tradition folk de la narration d’histoire, et en deviennent de fait plus accessibles, plus naturels. Les deux derniers morceaux sont dans ce cas, et Comme Blind Willie Mc Tell (cachée sur le volume III de ses bootlegs) reste une grande chanson en devenant une bonne chanson française.
Ce disque est un disque d’un fan (de Bob Dylan) pour des fans (de Cabrel) qui auraient sans doute préféré un album plus personnel. J’ai préféré les relectures des morceaux qui étaient déjà mes favoris, et jamais je n’ai hurlé à la trahison de ces chansons qui m’accompagneront vraisemblablement jusqu’à ma fin. C’est déjà une belle réalisation en soi. Tout ça m’a donné une envie énorme de réécouter Blonde On Blonde, The Times They Are A’Changin ou Blood On The Tracks. Même si la chanson française à large diffusion (ce disque est déjà certifié platine en France) n’est pas votre truc, n’hésitez pas à vous frotter à ce nouveau pan de l’influence énorme d’un des rares génies de notre époque.
Si on ne craignait pas autant les poncifs, on parlerait de ‘belle proposition de chanson française’ pour le sextette emmené par Roxane Terramorsi et Nicolas Gardel. Et on serait un peu convenus, certes, mais aussi dans le vrai. Parce que ce qu’on entend sur ce premier album, on ne l’a entendu comme ça chez personne d’autre.
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