mercredi 27 juillet 2016, par
En critique, la chance du débutant n’existe pas. Il serait illusoire de penser qu’en débarquant à la fin d’une discographie fournie l’avis serait plus frais et pertinent. Ça m’est arrivé aussi, je ne me fais pas d’illusion. Et puis il faut bien se lancer un jour.
Donc, dans le but de ne pas périr aussi idiot que je ne suis né, je me suis attelé à cette copieuse et dense discographie des Swans. Et bon, ça n’a pas été un long fleuve tranquille tant les débuts sont rudes, bruts et hardcore. Bien honnêtement, sans connaitre la suite, je me serais bien vite arrêté. Mais Swans n’est pas un groupe comme les autres et on peut aussi les appréhender comme un groupe ayant débuté en 2010, il est vrai après un hiatus de 14 ans. Pour mettre tout ça en perspective, je vais d’ailleurs m’atteler au bouquin de Benjamin Fogel consacré à la tête pensante Michael Gira. Ne pas mourir idiot, encore.
Ne vous laissez pas tromper par le fait qu’il ne comporte que huit titres, cet hénaurme album qui propose deux heures de musique. Et comme toutes les œuvres d’ampleur, il prend son temps pour démarrer. Le long premier morceau qui installe l’ambiance, avec quelques cris. Et puis on sent cette montée inéluctable. Seul un groupe sur de ses moyens et économe de ses effets peut avoir cette assurance, cette force tranquille. Je connais donc un peu Swans, certes, mais peut-être trop superficiellement pour ne pas rater les auto-références. C’est donc vers des formations comme Fields of The Nephilim que je me tourne pour retrouver cette transe un peu sombre, cette langueur de plaine désolée et humide. La voix n’est pas pareille, mais c’est le même plaisir de lâcher prise, de se laisser aller en compagnie d’artistes concernés et hantés.
On retrouve aussi ce gros grondement sur Cloud of The Unknowing. Et là, la mâchoire inférieure reprend sa liberté et descend. Oui, on est plus dans la densité de ciel d’orage de Godspeed You ! Black Emperor. Et ça en a la force de percussion, la même montée inexorable sur quelques accords, la section rythmique (avec aux fûts un certain Thor Harris déjà vu avec Shearwater) qui prend les choses en main. On a en plus une voix bien trippée qui déclame mais pour le reste, il partage le même potentiel de fascination, la même longueur hors normes (25 minutes tout de même), le même risque d’ennui si on ne pénètre pas cet univers et l’envie de les suivre au bout du voyage sonore dans le cas contraire. Et puis fatalement, un gros chaos qui fournit son content de frissons. Ils ne sont pas à leur coup d’essai bien entendu, on se rappelle le magnifique Lunacy sur The Seer.
Sur le plus lancinant The World Looks Red/ The World Looks Black, ils montrent toujours cette capacité à calmer le jeu, à placer du vrai chant pour mieux repartir, pour recréer du faux chaos. Parce que ce morceau en avait besoin, l’auditeur fourbu aussi.
People Like Us est un morceau de transition, une incartade loin du hors-format tout comme on en retrouvait sur les albums récents. Pour le coup, on n’est pas trop éloignés de l’univers de Nick Cave ou Black Heart Procession. Leur longue discographie montre des circonvolutions plus étranges que ceci il faut le dire, avec sur des albums récents une propension à se réfugier dans un folk presque pastoral dans ces moments-là.
Oui, on approche d’un post-rock burné sur Franckie M. La transe certaine mais bon, ses 20 minutes ne sont pas uniformément passionnantes et le déforcent dans le cadre d’un album aussi copieux. Il faut plus que When Will I Return pour le digérer. Ce morceau chanté par la femme Jennifer Gira est d’ailleurs troublant puisqu’on y entend un souvenir traumatisant d’agression. L’apaisement n’est donc que de surface.
Les plats de résistance s’enchainent donc et ce n’est pas le grandiose et trippant The Glowing Man qui passera pour une gentille transition. Le son est énorme, l’engagement total et l’effet garanti. On se calme pour le final Finally, Peace. Et c’est bien beau et intense, plus aéré que ce qu’on a entendu au long des deux heures d’écoute. La longueur est là, mais l’intensité aussi, et je dois bien avouer qu’on en sort essoré mais ravi, étonné d’être toujours là, comme après une randonnée grandiose qui emprunte plusieurs cols.
Impressionnant, intimidant même, voilà les épithètes qui viennent tout de suite à l’esprit quand on évoque ce The Glowing Man. Evidemment, elles s’appliquent aussi à toute la discographie récente du groupe de Michael Gira qui pense être à la fin d’un cycle. Ce qui signifie donc qu’on ne sait pas où ni quand l’attendre. Cet album fait en tout cas une remarquable synthèse de ce qu’on a pu attendre de la dernière mouture de cette formation tellement unique.
Bon, il faut un peu de temps devant vous pour déguster cette version live fournie avec le DVD offert avec la version deluxe du cd et qui donne envie d’aller voir ça en concert.
La musique, ce n’est pas seulement ce qu’on entend, c’est aussi ce que l’on projette. Fort de cet adage un peu ampoulé, on peut admettre que de la musique instrumentale puisse avoir un contenu politique. Et les Canadiens de Godspeed You ! Black Emperor en connaissent un rayon en la matière. Leur huitième album n’est pas tellement un cri de révolte ou un appel à la paix inenvisageable à l’heure (…)
Ce qui est rare est précieux. Et dans un contexte musical où le post-rock se raréfie, les plaisirs que confèrent une formation comme Mono ne sont pas reproductibes par d’autres genres et deviennent d’autant plus précieux. Mais cette rareté ne confère pas pour autant le statut de chef-d’œuvre au moindre album du genre, loin s’en faut même.
Une fois ces généralisations balancées, penchons-nous (…)
Si on avait croisé le chemin de Vincent Dupas quand il officiait en tant que My Name Is Nobody, on était passés à côté de ce projet qu’il partage avec Jean Baptiste Geoffroy et Jérôme Vassereau (ils sont aussi tous membres de Pneu). Le troisième album en onze sera donc l’occasion de faire la découverte.
On sent dès le début de We Grew Apart que le morceau ne restera pas aussi désolé et de (…)
l y a plusieurs expressions qui attirent immédiatement notre attention. Et big band n’en fait pas vraiment partie. Mais il faut reconnaitre que les effectifs pléthoriques sont aussi une belle façon de susciter l’ampleur. C’est précisément ce qui rend Oootoko immédiatement sympathique.
Impossible donc de valablement tenter le jeu des étiquettes. Même le terme générique de ’musique (…)
Jamie Stewart est un artiste qui fait de la musique excitante. De combien pouvez-vous dire ça ? On ne veut pas dire qu’il a toujours tout réussi, tout le temps, mais on prend toujours de ses nouvelles avec une curiosité certaine. On sait qu’on va être surpris, un peu secoués et peut-être même un peu soufflés. Ou même beaucoup soufflés dans le cas qui nous occupe, à savoir le successeur du (…)
Conor Oberst a aquis très tôt un statut culte, le genre dont il est compliqué de se dépêtrer. Lui qui se surprend ici à avoir vécu jusque 45 ans (il y est presque...) nous gratifie avec ses compagnons de route Mike Mogis et Nate Walcott d’un album qui suinte l’envie.
Cette envie se retrouve notamment dans la mélodie très dylanienne d’El Capitan. On peut retrouver quelques préoccupations du (…)
On a fatalement un panthéon de groupes indés attachants. Et tout en haut figure cette formation du Minnesota. On pourrait aussi citer The Rural Alberta Advantage ou Port O’Brien au sein de cet aéropage héritier d’une époque où l’engagement total était un style en soi. Le résultat est un charme fou lié à cette intensité réelle.
Hors mode donc mais leur inclination pro-climat, leur volonté de (…)
Prendre son temps pour écrire une critique de Loma, ça tombe sous le sens tant la richesse ce troisième album nécessite un certain approfondissement. Même si on fréquente musicalement Jonathan Meiburg depuis 20 ans, découvrir un album de Shearwater ou Loma n’est jamais anodin et il faut un temps pour que toutes ses subtilités se dévoilent. Il en a été de même ici. Petit rappel des faits, Loma (…)