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Séance de Rattrapage #56 - Lou Canon, Midori Takada, Father John Misty

jeudi 27 avril 2017, par marc, Mathusalem


Lou Canon - Suspicious

Le Net... C’est bien, on y furète, on y furète... et parfois on y découvre de jolies choses, le Suspicious de Lou Canon, par exemple. Parce qu’on aime bien, ici, les assemblages sonores qui vont et viennent, survolant les genres, oscillants...qui tergiversent entre Pop Electro et Indie en titillant parfois, l’air de rien, le Trip Hop.

On s’y surprend à virevolter d’un état d’âme à l’autre, en swinguant langoureusement entre beat espiègle, évanescence paisible et bruitisme anxiogène. Vu sous cet angle, on serait tenté d’avancer que la Canadienne de Toronto hante à peu près les mêmes territoires musicaux que des gens comme Jenny Hval, la rigueur glaciale scandinave en moins.

En matière d’influences, et après plusieurs écoutes de Suspicious, on se dirigerait plutôt vers des gens comme Poliça, (établis eux aussi non loin de là, à Minneapolis, dans un autre pays, de l’autre côté des Grands Lacs, en fait)…Mais un Poliça auquel on aurait gommé la tribalité des deux batteries et le groove moite de la basse ronflante au profit d’apports synthétiques savamment dosés, servant eux-mêmes de socle à la charmante voix de Leanne Greyerbiehl (AKA Lou Canon), institutrice de son état…(Enfin...c’était avant que Hayden, son beau –frère, ne lui offre un Home Studio).

Il est des choses qui parfois changent des vies… Un cadeau de Noël, par exemple. (Mathusalem)

Midori Takada - Through the Looking Glass

Disons-le tout net Through the Looking Glass, le premier album de Midori Takada, est un intemporel autant qu’inclassable petit bijou. Sorti en 1983, à une époque où l’Asian Touch était tendance (souvenons-nous des Tin Drum et Oil on Canvas de Japan, du Forbidden Colors de Ryuichi Sakamoto...), ce disque d’Ambient minimaliste aux influences disparates faisait figure de soucoupe volante, petite chose délicate et improbable virevoltant entre les long-courriers commerciaux du moment.

Enregistré en deux jours, imprégné d’influences autant africaines que japonaises, ponctué de bruits improbables (bouteille de Coca-Cola, harmonium, enchevêtrements sonores et emboîtages rythmiques) il en ressort pourtant une impression globale de sérénité limpide. On n’écoute pas cet album, on y entre, un peu comme on aborde l’univers de Lewis Caroll (dont s’inspire le titre de l’album, par ailleurs)… Sauf qu’une fois dedans, la musique de Midori Takada n’impose rien, elle suggère, tout simplement. Les impressions se remanient et fluctuent donc perpétuellement, d’auditeur en auditeur, d’audition en audition aussi…

A l’évidence, bien plus qu’un disque, Through the Looking Glass est une porte.
Disparu des discosphères, même les plus confidentielles, depuis de nombreuses années, cet ouvrage mythique est désormais réédité, toujours en format vinyle, par Palto Flats et WRWTFWW (*) Records. Et c’est une très bonne chose. (Mathusalem)

Father John Misty - Pure Comedy

On a connu Josh Tillman en tant que batteur des Fleet Foxes, tout seul avec sa guitare acoustique et en amuseur public de concerts en tant que Father John Misty. Autant dire qu’il a déjà un joli parcours derrière lui pourtant, si ses expériences passées semblaient déjà bien convaincantes, il semble avec ce nouveau projet se réaliser complètement.

On est avec son troisième album toujours sur le fil, entre l’époustouflant (Total Entertainment Forever) et l’anodin, l’ample et le trop riche. Un peu à l’image ses interviews qu’il donne. C’est sans doute aussi une des raisons d’une popularité croissante. Oui, de la balade avec une batterie immuable qui semble avoir été enregistrée dans les années ’70. Dans le genre, c’est plus gratifiant et moins kitsch que ce que nous a livré l’acclamé Tobias Jesso il y a deux ans. Ceci dit, si on est un peu inattentifs et qu’on a oublié le pédigrée du bonhomme, on pourrait se croire sur un Elton John hors d’âge

Mais Josh se donne les moyens de sa politique, et rien que ça force le respect. Cet album très généreux dans sa durée (propose des chansons qui font la part belle aux textes, ce qui ne facilite pas sa diffusion de par chez nous mais participe de sa popularité outre-Atlantique. Ce qui nous vaut aussi des morceaux prolixes de dix ou treize minutes.

Au final, on ressort un peu lessivés mais contents d’avoir fréquenté celui qui se présente mine de rien comme un des auteurs de notre époque. (Marc)


P.-S.

(*) « We Release Whatever The Fuck We Want »… Nom à la fois incongru et pourtant si seyant pour un label qui assume avec autant de truculence ses choix à risques.

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