lundi 10 juin 2019, par
Il est toujours intimidant de se frotter à un nouvel album de The National. Sans fanfare ni trompette (en fait, si, il y en a parfois), ils se sont hissés au sommet, à un point tel qu’on ne voit pas qui peut leur contester le statut de plus grand groupe rock du moment. Si vous pensez à d’autres, ils sont probablement dans une phase de décroissance créative (essayez, vous verrez). Cette considération sans doute un peu provocatrice et peu utile mise à part, constatons que leur succès est vraiment mérité.
Les albums de The National deviennent vraiment complexes. La maîtrise des frères Dressner a toujours été manifeste mais elle semble en permanente expansion, se présentant comme une leçon pour tous les Coldplay de la terre. Cette évolution, cette progression constante est indispensable pour ne pas s’enfermer dans ses propres références. Parce que des marqueurs forts, il y en a toujours eu à foison chez The National. Ces sons de guitare triturés, cette batterie légère mais fouillée reconnaissable à cent mètres (Roman Holiday), ce clavier aussi en intro de Quiet Light, le son bien épais et rond et surtout cette voix chaude et tellement humaine de Matt Berninger.
C’est le producteur de cinéma Mike Mills qui a lancé l’idée d’une collaboration avec le groupe. Un court-métrage du même nom que cet album existe donc et Mills est crédité en tant que producteur, lui qui confessait ne rien connaitre à la musique. C’est sans doute par fausse modestie, il y a nombre d’idées ici et il peut en porter le crédit.
Si on compare l’ouverture de You Had Your soul With You avec, disons, Fake Empire, on voit que le plaisir n’est pas le même. Il est moins immédiat, moins viscéral. Mais on est à chaque fois restés accrochés jusqu’au bout des écoutes.
La voix de Matt Berninger est présente bien évidemment, mais partage les avant-postes avec une flopée d’invitées vocales féminines qui vient modifier l’équilibre préétabli, pour le meilleur. Il y a donc Mia Tindle sur Oblivions, Lisa Hannigan (sur The Pull Of You), Gail Ann Dorsey (Hey Rosey), Kate Stables de This Is The Kit sur un doux I Am Easy To Find. Le genre de morceau qui ne paye peut-être pas de mine mais a toujours fini par s’imposer. On signale carrément une chorale sur Dust Swirls in Strange Light. On regrettera à titre personnel l’absence de la formidable Phoebe Bridgers alors qu’elle est quelques fois venue renforcer ces morceaux récemment en tournée. Il faut évidemment mentionner que l’écriture est partagée entre Matt Berninger et sa femme Carin Besser pour un résultat troublant de sincérité.
Parfois, l’abus de morceaux apaisés fait perdre l’attention sur cet album très copieux (16 titres pour 63 minutes). Mais la finesse du final de So Far so Fast emporte l’adhésion. On ne retrouve sans doute pas de titre nettement au-dessus du lot mais les grands morceaux s’enchainent, forçant sans doute plus l’admiration qu’ils ne nouent la gorge. C’est aussi une étrange idée de proposer Hairpin Turns comme single alors que ce n’est vraiment pas le morceau le plus direct de l’album, c’est même malgré ses qualités intrinsèques un de ceux qui en diluent un peu l’attention. Par contre, on était plus clients du magnifique Light Years et c’est sans doute un de ceux vers lequel on reviendra le plus volontiers.
Sans doute pas assez direct pour servir de poste d’accès (pour ça, commencez par Boxer ou le Cherry Tree EP si vous êtes pressés), ce nouvel album de The National est impressionnant. The National n’est plus un coin à champignons depuis longtemps et rien que maintenir le cap avec leur succès actuel serait déjà une performance. Ils font bien plus que ça pourtant, en mêlant une complexité croissante et une lisibilité qui n’en diminue pas pour autant. Pour ces raisons factuelles et plus personnelles, ce groupe est simplement unique et sur le toit du monde de façon plus que méritée.
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