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Beth Gibbons - Lives Outgrown

mercredi 5 juin 2024, par marc


Si après 15 années de Beak> et 5 albums, Geoff Barrow est toujours considéré comme ’le mec de Portishead’, que dire de Beth Gibbons qui s’est effacée de la vie publique depuis tant d’années ? Cette sortie a donc autant surpris qu’enchanté.

Fort heureusement, musicalement, ce Lives Outgrown ne tente pas de souffler sur les braises du trip-hop. Et c’est intentionnel. Le résultat est donc moins ancré dans une époque. La batterie se veut radicalement différente et c’est une des réussites de cet album. Et on applaudit la subtilité et la force de celle de Burden of Life qui laisse de la place à la voix de Beth. Si on ajoute les cordes, on a forcément un grand morceau. Tout comme le limpide comme Floating On A Moment qui fait une entrée fracassante dans les meilleurs de 2024. Oui, c’est à a fois simple et poignant, tout comme Burden of Life qui ajoute du violon caressant ou grinçant.

La voix est toujours là, intacte, précieuse. Mais elle ne semble plus chanter comme sa vie en dépendait. Si c’est l’absence et ses conséquences qui semble avoir été le moteur de la créativité de cet album, le désespoir n’est pas ce qui frappe. C’est la beauté qui prime et qui domine tout du long. Et son chant n’est pas que plaintif ou fragile. C’est lui qui mène ces morceaux, et ils sont solides. La mélancolie qui sourd de Lost Changes est irrésistible en tout cas, et les mélodies comme celles d’Oceans sont inattaquables aussi.

C’est un bon album parce qu’il a une belle coloration et d’excellents morceaux pour l’incarner, c’est aussi simple que ça. Et même si la voix de Beth Gibbons reste le point d’attraction, le manque de ressemblance littérale avec Portishead est aussi appréciable. Baigné de nostalgie dans ses thèmes, elle ne transparait pas dans les choix musicaux et même si on doit attendre son successeur pendant de nombreuses années, cet inoxydable compagnon va rester auprès de nous pendant bien longtemps.

    Article Ecrit par marc

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2 Messages

  • Beth Gibbons - Lives Outgrown 7 juin 07:21, par Laurent

    Il est, en effet, vraiment long en bouche celui-ci ! La comparaison avec une bouteille de pinard pas donnée n’est franchement pas galvaudée pour le coup : on tient là un des tout bons. Curieusement, ce n’est pas la voix qui m’a le plus happé ici (peut-être parce qu’on la connaît par cœur ?). Il faut dire qu’elle n’en fait pas plus qu’il ne faut et que ça se marie juste parfaitement avec le reste. Dont ces percussions géniales, tu as raison de le souligner. Rien à dire, dans sa catégorie c’est assez proche de la perfection. Beth a bien fait de prendre son temps, et je regrette déjà d’avoir passé mon tour pour le Cirque Royal.

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    • Beth Gibbons - Lives Outgrown 10 juin 16:59, par marc

      Sans doute un album qu’on pourra ressortir dans problème dans plusieurs années. Sa voix n’en fait pas des caisses, n’appuie pas trop sur la nostalgie de morceaux qu’on connaît trop, c’est une autre réussite.
      Et puis la production de Tom Ford est souveraine.

      J’ai aussi loupé son passage chez nous, une habitude en fait...

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