Accueil > Critiques > 2007

Apparat - Walls

vendredi 28 septembre 2007, par marc

Le silence est d’or


Si j’écoute de la musique électronique avec une certaine assiduité, profitant des conseils glanés chez d’éclairés connaisseurs, j’ai toujours considéré que j’y connais trop peu pour bien en parler. Apparat nous avait vraiment soufflés, un jour où un peu par hasard on était allé le voir au Beurschouwburg. Sa prestation et sa disponibilité étaient en effet très séduisantes. Si on ajoute qu’il était en partie derrière l’album Orchestea Of Bubbles de sa comparse Ellen Alien, la curiosité était légitime. Il faut bien le dire, l’album a trainé sur mon ipod pendant plusieurs mois, avant même que je ne jette une oreille dessus. Il faut croire que son heure est venue, c’est tout.

Apparat capte l’attention dès les premières minutes de Not A Number. Toute la panoplie y passe ou presque : arrangement de cordes (synthétiques), mélodie accrocheuse à base de cloches, montée en intensité, la maîtrise semble presque absolue. Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles ? C’est à ce moment qu’intervient la voix.

Il faut être prudent quand on introduit des voix dans la musique qui fait blip. On tombe vite dans le syndrome diva dance, le piège rédhibitoire. Les solutions sont éprouvées depuis longtemps : vocodeur kitsch (Daft Punk), distorsion extrême (The Knife), chant désincarné (Miss Kittin) ou encore lignes floues et sous-mixées (Underworld). Tout ça pour dire que ce sont les moments où Sasha (son prénom dans la vraie vie) se fait entendre qui me séduisent moins sur cet album. Ce n’est pas indigne, loin de là mais c’est un peu trop lisse par rapport à la force de la musique comme sur Headup. De plus, on s’y habitue relativement vite. Mais pour atteindre les sommets auquel il peut légitimement prétendre, il lui faudra sans doute étoffer son carnet d’adresse de vocalistes. On se prend à rêver par exemple d’une Hope Sandoval posant sa voix là-dessus.

J’ai déjà parlé de l’état de nervosité dans lequel me plonge l’électro lente. C’est pourquoi les albums de Junior Boys et Royksopp m’ont tant irrité malgré leurs qualités musicales. Il vaut mieux une musique d’ambiance bien faite et assumée que de la dance molle folasse. C’est une réflexion purement personnelle, à vous de voir où vous vous situez. Ici par contre, je cède de façon inconditionnelle

A l’heure ou certains effectuent un virage vers le tout rythmique (écoutez le faux mix de Ricardo Villalobos sur le Fabric 36 si vous aimez les expériences borderline), Apparat se fait plus soyeux. Par exemple, You Don’t Know Me donnerait presque envie de réaliser des films pour l’illustrer. Les violons synthétiques ne sont pourtant pas ce qu’on fait de mieux pour susciter une ambiance. Qu’à cela ne tienne, ceux d’Useless Information sont impeccables et ce morceau est une preuve de sa subtilité. A l’heure où Massive Attack va nous revenir sans qu’on en attende grand-chose suite à leur 100th Window pas passionnant, la relève est sans doute déjà prête. Certains morceaux prouvent en tous cas qu’il est moins sucré qu’un Craig Armstrong dans les arrangements. Il est souvent vain d’opposer des groupes mais ici, c’est un peu la meilleure évolution qu’aurait pu accomplir le duo de Bristol. Une fois qu’on a ce groupe historique en tête, l’analogie fonctionne pour une partie de ce disque. Mais pas entièrement, la part d’électronique étant plus importante et le groove moins présent.

Donc, en résumé, la version karaoké ou instrumentale serait un de mes albums de l’année mais trop souvent, sa voix en fausset m’empêche de pleinement apprécier certaines des plages de ce Walls de haute volée. Les instrumentaux sont par contre parmi les plus forts du genre. Tout le monde à de toute façon intérêt à se frotter à ce désormais grand nom de la musique tout court.

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

  • Underworld - Strawberry Hotel

    Il est des artistes qui mieux que d’autres nous ont donné des envies d’ailleurs, de champs musicaux inexplorés. Pour les amateurs de rock au sens large, des gens comme Underworld ont été des passeurs, comme New Order avait pu l’être pour des gens (encore) plus âgés que nous.
    Cette émancipation auditive était aussi bien ancrée dans son époque, et s’il n’est pas incroyable de retrouver le (…)

  • Paris Orly – La Réserve

    Le fond et la forme. La forme et le fond. Paroles et musique. La dualité est bien connue et on la retrouve ici, bien mise en avant sur ce premier album de Stéphane Loisel. Des mélanges sont encore à tenter et celui-ci a sa personnalité propre.
    Sur la forme tout d’abord, on peut dire que c’est réussi puisque des versions instrumentales pourraient fonctionner. Italo-disco, electro, le (…)

  • La Démesure du Pas – Migratory Music

    Si le hasard ou l’habitude vous guident vers ces colonnes, c’est qu’une certaine curiosité musicale vous titille. Partant de ce postulat, on se permet souvent de plonger dans des pans plus aventureux de la musique, quitte à s’y perdre parfois. Cet album parait sur Ormo records qui nous avait déjà gratifié d’œuvres comme Alan Regardin ou No Tongues, défricheurs de possibles (ref belge) (…)

  • Bear of Bombay - PsychoDreamElectroGaze

    Lire une étiquette est une règle de bonne pratique avant d’ingurgiter quelque chose. Le nom de l’album du Milanais Lorenzo Parisini qui officie sous le nom de Bear of Bombay ne laisse planer que peu de doute quant à son contenu et on l’avale d’un coup d’un seul en parfaite connaissance de cause.
    PsychoDreamElectroGaze donc... Tout est là, avec une densité certaine de Tears From Space, qui (…)