jeudi 10 janvier 2008, par
Une grosse envie d’été
Voyez-y du mauvais esprit si ça vous chante mais certaines musiques m’ont l’air d’avoir pour intention de brouiller le pauvre critique. C’est que quand on pense que tous les assemblages ont été tentés, il reste encore des pistes à exploiter. Dès lors, essayer de brancher un groupe et son public, ce qui est le but implicite de ce site devient compliqué. On va quand même tenter de vous intéresser à ce rattrapage de l’année écoulée.
La musique de Yeasayer est une des preuves auditives que toutes les boutures sont à même de prendre quand un peu de talent est employé à leur réalisation. Une fois encore, c’est par la voie des comparaisons tordues que j’espère m’en sortir. J’évoquerai donc une sorte de Tv On The Radio en tongs, de Panda Bear à la plage, voire Caribou au club méd. Ils partagent avec les premiers le goût de la soul détournée et des voix de tête (le brillant Sunrise d’ouverture), avec les seconds un sens de la mélopée (Germs et Ah, Weir qui se succèdent) et les troisième celui des harmonies vocales. Car ils jouent sur plusieurs fronts, ceux de la texture et du son, mais aussi celui de l’harmonie. C’est qu’après cinq jours d’enregistrement seulement ce sont des mois de postproduction qui ont été consacrés au polissage de ces morceaux.
C’est la chanson 2080, qui a fait le tour des blogs qui est à l’origine de la réputation apocalyptique du propos de Yeasayer malgré l’aspect très ensoleillé (africain ?) du morceau. Honnêtement, même si mon anglais n’est tellement à blâmer sur ce coup-là, les paroles ne sont pas exactement mixées en avant et restent peu intelligible pour le francophone moyen.
On dénotera aussi au passage de grandes traces de psychédélisme (Wait For The Summer est fort réussi) qui rendent écoute ensoleillée et plutôt variée. C’est que certains premiers Pink Floyd ne sont pas loin (Wintertime). Et ce ne sont pas les parties de guitare d’un No Need To Worry, judicieusement placées qui infirment cette impression. On aura presque fini le name-dropping avec le Paul Simon circa Graceland puisque visiblement ces gaillards proposent une vision détournée de l’afrobeat.
Les voix, souvent dédoublées, sont le ciment entre toutes ces chansons certes très cohérentes dans leur intention mais moins uniformes dans le traitement. Il est très étrange d’avoir passé une année en citant aussi souvent les Beach Boys. Bien que tombant parfois dans la redite, cet album de Yeasayer intrigue et enchante aussi. C’est qu’il se dégage de son écoute (surtout répétée) une volonté de tracer son propre chemin qui les distingue. Même si la famille d’intention est connue (celle qui va de A sunny Day In Glasgow à Vampire Weekend), c’est un de ces groupes pour lesquels on pourrait créer une étiquette pour eux seuls. C’est qu’il ne s’agit pas d’influences diverses de musiciens qui décident de jouer ensemble ni d’une compilation sautant d’un genre à l’autre mais d’une enfilade de morceaux cohérents.
Vers la fin de l’album l’attention chute inévitablement puisque les morceaux plus anodins s’y retrouvent groupés. Ecouter l’album dans un ordre aléatoire confirme que ce n’est pas la lassitude qui en est la cause. On n’a donc pas l’intransigeance d’un Animal Collective mais pas non plus la facilité pop de l’imminent Vampire Weekend. Gentiment barrée, la musique de Yeasayer est à même de satisfaire les curieux qui souhaitent une pause dans des expérimentations. L’alternative est intéressante, trop lumineuse pour sembler prétentieuse, mais manque peut-être un peu de quelques titres plus puissants pour oser défier les nouvelles références. C’est donc comme complément psychédélique aux indispensables défricheurs qu’il faut les appréhender que comme la révélation de l’année 2007. A part les allergiques aux chœurs, tout le monde pourra trouver un intérêt pour cet album qui flanque une sérieuse envie d’été.
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