lundi 18 février 2008, par
Perdons-nous dans les bois
Peut-être est-ce le cas dans tous les pays de la planète (j’en doute), mais les groupes belges déchainent les passions, positives ou très négatives en raison même de leur provenance. Ras-le-bol d’une supposée complaisance de la presse mainstream, laquelle n’écorche jamais se compatriotes, impossibilité de juger un produit du terroir ? Toujours est-il que les réactions sur les blogs sont parfois hallucinantes de violence. C’est donc avec un regard de Sirius, cet inestimable et si difficile recul que je tente d’aborder le second album des filles d’Hawaï du Brabant Wallon. Qu’en penserait-on s’ils venaient d’un bled du Wisconsin ? C’est peut-être la seule vraie question à se poser. On écoute des groupes à raison d’une centaine par an et si ce n’est pas le plus indigne de ce qui passera dans nos oreilles, on est trop éloignés du haut du panier (un album sur deux sui vient du Canada par exemple) pour y revenir très souvent. Cette pop luxuriante mais trop jolie n’est décidément pas mon genre préféré, ce qui devrait vous amener à modérer les propos qui vont suivre.
Pour ne les avoir vus qu’une seule fois sur scène, je ne peux pas conclure que ce n’est vraiment pas leur domaine de prédilection. Il n’en reste pas moins que quand on voit souvent de vieux briscards outre-Atlantique brûler les planches, on peut les trouver à la limite touchants de retenue, mais pas subjugués. Ce n’est cependant pas le but d’une critique de Cd de traiter de cet aspect, mais au moins on ne pourra pas dire que ce sont des poseurs. Placer une pochette pareille après Interpol (et Ola Podria) c’est un peu être troisième sur la balle. Mais ça dénote aussi une volonté, non pas de choquer (la bête est morte quand même) mais de s’affirmer.
Un second album est toujours périlleux. Le nom est connu, le public existe et a des attentes. Quatre ans depuisFrom Here To There c’est long aussi. This Farm Will End Up In Fire (Il faudra un jour mesurer le traumatisme qu’a constitué dEUS sur la scène belge, dont on en ressent encore les effets chez les Girls In Hawaï près de quatorze ans après la sortie de Worst Case Scenario), le morceau annonciateur de cet album n’est pas exactement radiophonique, ce qui nous a fait craindre le pire. Pas qu’il soit mauvais mais il n’est pas à sa place sur la bande fm. Espérons qu’ils choisiront mieux leurs prochains simples.
Le chant est clairement le maillon faible du combo de Braine-l’Alleud. S’il apporte son lot de proximité, il est noyé sous les effets et semble inapte à autre chose que le fredonnement. Les chœurs ne sont pas non plus ma tasse de thé, et pas seulement chez eux. Il s’en dégage une ambiance un peu mièvre qui est en contradiction avec l’ambition de l’orchestration. Quand ils injectent un peu d’électricité (ce qui rehaussera sans doute les prestations scéniques), on peut les comparer à nos autres compatriotes de Mud Flow, ces derniers ayant cependant l’avantage d’évoluer sur leur terrain dans le rock. De plus, le fausset n’est pas vraiment raccord. C’est qu’il manque la vraie aspérité, la liberté de ton d’un Spencer Krug (Frog Eyes, Sunset Rubdown, Wolf Parade). Je les préfère dans leurs moments d’une pop riche mais suivant une ligne directrice. Je ne suis pas contre les essais et expérimentations, mais une musique à vocation pop se doit de procurer du plaisir d’écoute avant tout. Ils semblent à la recherche de la bonne idée, qu’ils espèrent trouver au détour de méandres tortueux mais qui parfois génèrent plus de confusion que de réussite (les mélodies peuvent se faire limpides sur Couples On Tv). C’est ce qui rend cette musique faite de jolis éléments pas immédiatement séduisante.
Ce que je préfère ? Les passages instrumentaux (sur Fields of Gold) qui succèdent à des passages chantés plus éprouvants. Mais le meilleur n’est pas là. C’est la simplicité de la plage titulaire qui fait mouche. C’est une des rares à avoir une ligne mélodique claire et un morceau qui tend vers un but. Le resserrement est une qualité trop souvent négligée. Il faut donc attendre le dernier morceau pour que le meilleur arrive (comme sur le dernier Wilco par exemple). Dans le même ordre d’idées, il faut souligner qu’ils ont parfois la lucidité de laisser un morceau instrumental plutôt que lui greffer une partie chantée pas nécessaire (Road To Luna). On a même droit à un interlude instrumental, portant un nom numérique comme chez Pierre Lapointe, voire un pur moment de transition, très court et ne faisant pas avancer le schmilblick (The Coral).
Finalement, cet album n’est absolument pas vénéneux et c’est là que réside sa principale faiblesse. On guette l’émotion pure, celle qui renverse tout, mais la palette proposée ici est plus retenue. Ce n’est pas un reproche en soi, juste que ce n’est pas le joli qui me fait revenir sur un album une fois la critique mise en ligne. D’une manière générale, l’album se termine bien mieux qu’il ne commence. Ne vous laissez donc pas décourager par la mollesse du début. C’est aussi un album qui grandit dans l’estime au fil des écoutes.
Un groupe éloigné dans l’espace nous arriverait plus au point, après plusieurs albums sans doute (encore que la possibilité de buzz Internet diminue ce temps de latence). La maturité est envisageable mais elle n’est pas encore là pour ce second album. Encore engoncés dans ses tics et n’osant pas toujours resserrer son écriture sur l’essentiel, ils en sont sans doute pas encore à même de gérer la complexité de leurs désirs musicaux. Mais comme l’éclaircie peut surgir au détour d’une bribe de morceau, voire d’un titre complet, on déduira que GIH se cherche encore, et que le meilleur est encore à venir, quand ils se rendront compte que la puissance de l’interprétation l’emporte sur les intentions fouillées de la composition défendue trop faiblement. Ils remplissent donc leur contrat, à savoir contenter les amateurs du premier album tout en semblant un peu sortir de leur coquille. On espère qu’ils pourront surmonter leurs limitations (vocales et charismatiques) pour imposer le songwriting complexe auquel ils ont l’air d’aspirer et qu’ils ne maitrisent pas totalement. Si je dois donner un avis personnel, tout ceci se révèle plus gentil que passionnant.
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