mercredi 17 mai 2017, par
Une déclinaison live d’un album qui avait beaucoup plu, ça ressemble de loin à une opération marketing facile. De loin évidemment, et sans prendre en compte le fait qu’on parle de Sufjan Stevens et qu’en termes d’opportunisme vénal, on ne peut vraiment rien lui reprocher.
Il est rare qu’on sache tout de suite à la sortie d’un album qu’on tient un pur classique mais c’était le cas pour Carrie & Lowell. Evidemment, la réécoute de l’album est indispensable de temps en temps, il a l’étoffe d’un classique qu’on ressortira dans problème dans vingt ans. Il y confirmait un talent qu’on a découvert il y a bien longtemps mais qu’un tempérament créatif assez démesuré avait un peu caché sous des couches de délire assumé. En l’état, les onze morceaux de cet album ne demandaient pas de variations, n’appelaient pas de frustration.
Pourtant, au moment de les prendre avec lui sur la route, Stevens a voulu en faire une relecture, notamment parce qu’il avoue avoir pris trop peu de plaisir à les enregistrer tant la charge émotionnelle était forte. On peut faire rapidement le parallèle avec la mise à jour récente que Conor Oberst avait fait de son album acoustique et qui avait moins convaincu mais il faut aussi avouer que Sufjan a déjà sorti des albums infiniment plus perchés, voire carrément inaccessibles. Donc la révision n’a pas seulement consisté à faire rentrer ces morceaux de toute façon parfaits dans un moule mainstream. Ce qui est à noter aussi, c’est que l’incorporation d’éléments nouveaux n’est pas uniforme,
Il faut sortir le mot de temps en temps, ce sont ses délires prog qui ressortent. Les sons de synthé de Should Have Known Better ne sont là que pour annoncer la variations mais ils sont très connotés. De même, All of Me Wants All of You prend ses aises avant de proposer un solo de clavier qu’on aurait bien imaginé sur une version rare de l’album Wish You Were Here de Pink Floyd. Non, ce n’est plus d’une intimité folle mais comme il réserve ce traitement à peu de titres et que bon, le talent de ces musiciens est proprement soufflant, on se voit mal ronchonner. On retrouve aussi cette façon sur la Seconde partie orchestrale de The Only One Thing.
Evidemment, ça reste bien beau quand les morceaux restent simples (Death With Dignity), avec quelques chœurs. Les morceaux de base sont impeccablement charpentés. On le savait mais on se rend compte à quel point ils résistent à tous ces traitements, surtout quand ils en renforcent la densité. La fin de John My Beloved est assez remarquable sur ce point. ll y a aussi des paroles qui peuvent faire monter les larmes et il y en a sur Should Have Known Better. Forth of July se termine tout de même par ‘We’re all gonna die’. Cette fin est maintenant complètement revue, la même phrase prenant une tout autre résonnance, presque cathartique.
Pour être complètement sincères, on constate tout de même un petit creux de second tiers d’album, la longueur de la version studio convenant mieux à la constance. Vesuvius et Futile Devices sont eux issus du très barré Age of Adz(album qui m’a tant intimidé que je m’en suis plutôt détourné) et on ne fera pas semblant que la fin du premier nommé est un moment de grande délectation musicale. Notons aussi que nous ne retrouvons pas de trace d’autres albums. N’attendez donc pas un best-of pour cet album dont le titre il est vrai n’est pas équivoque à ce propos.
Blue Bucket a même droit à son prolongement de 12 minutes. Si un intermède pareil peut s’envisager dans une prestation de Godspeed You ! Black Emperor, elle ne semble pas indispensable ici. On notera plus pour l’anecdote l’idée plutôt surprenante de reprendre en rappel Hotline Bling de Drake, scie radiophonique qu’on ne connait que trop. Bon, ce n’est pas le meilleur de ce qu’on entendra ici mais situe assez bien la différence d’état d’esprit entre le studio et la scène.
Plutôt complémentaire de l’album dont il est issu, ce live qui le voit étendre, augmenter et densifier tous ces morceaux parfaits est donc bien moins inutile qu’on pourrait le penser de prime abord et renforce l’idée qu’on devrait le voir en concert dès que c’est possible (et ce n’est pas souvent chez nous…).
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