Accueil > Critiques > 2007

Editors - An End Has A Start

mardi 26 juin 2007, par marc

La volonté de puissance


Les sorties d’albums sont-elles cycliques ? On peut en tout cas constater que tout ce qui nous a plu en 2005 repointe son nez cette année. Editors nous avait plu. C’est The Back Room qui avait surnagé du ressac new-wave qui sévissait. On ajoutera aussi I Love You But I’ve Chosen Darkness pour être complet. Le temps a fait son œuvre et cet album un peu froid mais intime, délicat et travaillé, a conquis notre adhésion.

Il y a un peu plus de couleurs que sur la pochette que sur celle du précédent. C’est maigre comme indication mais c’est toujours ça de pris. On se demandait si comme tant d’autres ils allaient revenir gonflés de testostérone. La réponse est oui. Mais au contraire des placebos sonores, le résultat est réjouissant parce que puissant. C’est qu’il y a d’évidents moments de bravoure, de ceux qui pourraient être gâchés par trop de volonté héroïque mais qui ont du souffle (Bones). Il y a encore ces reprises de ton, ces espèces de montées (When Anger Shows), ces moments qui se veulent paroxystiques le sont parfois (Escape The Nest). Une mélodie réussie (The Racing Rats) fait la différence entre un bon morceau et un morceau vraiment accrocheur. Dans ces cas, on a des titres immédiats qu’on n’hésitera pas à réécouter.

When Anger Shows qui a une mélodie qui montre quand même une fragilité dans la voix de Tom Smith. On imagine pour les avoir déjà vus en concert que ça va être difficile à tenir en live .Assez typée dans le genre grave, elle ne s’exprime pas de la manière maniérée qui rend l’écoute de The Departure, Forward Russia ou White Rose Movement pénible par l’affectation artificielle. Ces groupes-là sont destinés à sortir du radar de toute façon. Les années ’80 s’éloignent et ce n’est pas toujours dommage. C’était une phase nécessaire pour prendre les ingrédients où ils étaient mais la modernisation est en marche. On s’éloigne donc des réinterprétations trop littérales de Joy Division ou autres Chameleons.

La guitare est moins mise en avant que chez Interpol par exemple. Gageons d’ailleurs qu’on ne va pas tarder à renvoyer ces deux groupes dos-à-dos tant cet album piétine les plates-bandes des New-Yorkais. Il y a de la place dans nos oreilles pour les deux mais la langueur des Anglais a mes faveurs. Parce qu’ils se retiennent moins. Ce qui les amène à employer des chœurs pas toujours d’un gout exquis par exemple. On leur pardonne même de se laisser aller à la balade sur Put Your Head Towards The Air. Il faut quand même une bonne dose d’autosuggestion pour trouver ça formidable. Même si ils sortent l’artillerie lourde. Ce n’est que sur l’ultime morceau qu’ils reposent les armes pour nous montrer que, finalement, ils n’avaient pas besoin de tout ça. C’est une impression qu’on a déjà eue avec le dernier The National. C’est un procédé courant quand on veut être sûr de son coup (An End Has A Start) et a déjà été utilisé dans un passé récent (Bloc Party en concert).

Donc, sur le papier, les défauts rédhibitoires et récurrents de ces derniers temps sont encore là. Pourquoi cet album reste-t-il obstinément vissé à ma platine et pas les autres ? C’est la part de mystère et de subjectivité que je souhaite garder. Les moyens de production sont démesurés de nos jours, donc la tentation est grande d’en faire un peu trop. Beaucoup de gens sont tombés dedans avec plus (Arcade Fire) ou moins (The Killers) de bonheur. Editors a réchauffé un peu sa musique. Comme tout le monde, ils essaient d’étoffer le son pour leur second album. Bien que cet avis soit subjectif, je dois avouer que c’est réussi. Ils ont su ajouter un peu de souffle à ces chansons qui se veulent des hymnes. Et le sont souvent. Intellectuellement, cet album tend le bâton pour se faire battre et gageons qu’il va se faire souvent étriller. Mais si je dois en croire mon sourire à chacune des très nombreuses écoutes, cet album fait un bien fou.

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

4 Messages

  • Editors - An End Has A Start 30 janvier 2008 16:15, par Angelsgone

    J’aime bien les editors mais il faut admettre que parfois sur cet album on pense plus a Coldplay qu’a Interpol...

    En tout cas le prochain album sera décisif pour savoir si ils ont sauvés leur âmes ou s’ils sont définitivement tombés dans le gros mainstream qui tâche.

    Voir en ligne : http://www.myspace.com/angelsgone

    repondre message

    • Editors - An End Has A Start 28 février 2008 20:18, par sebduj

      Faut-il conclure que Coldplay est un groupe gros mainstream qui tâche et Interpol un groupe qui a sauvé son âme ? Et les pauvres Editors qui sont sur le point de tomber dans le fossé mainstream. Tiens moi au courant Angelsgone, quand tu estimeras qu’ils ont perdu leur âme, pour que je ne me salisse pas en les écoutant.

      Blague à part, je voulais juste venir ici pour dire que cet album tourne beaucoup de par chez moi et qu’il est celui qui excite le plus mais petites oreilles. J’espère que je ne perds pas mon âme ;-)

      repondre message

  • Lescop - Rêve Parti

    Il y a des noms qui sont liés à une époque, qu’on oublie forcément un peu avant de les voir ressurgir de nulle part. Lescop fait partie de ceux-là, vous l’avez definé, petit.e.s futé.e.s que vous êtes. Les années ’80 sont une esthétique qui n’a plus déserté le paysage musical depuis plus de 20 ans. Mais si ce troisième album reste dans ce (micro)sillon, il le fait avec tant d’allant qu’on ne (…)

  • LSSNS - Transit

    I know it when I see It
    Cette phrase d’un juge de la cour suprême américaine quand on lui demandait ce qu’était la pornographie peut aussi s’appliquer à certains styles musicaux, aussi faciles à identifier que compliqués à décrire. Les années ’80, ce n’est pas qu’une lointaine décennie, c’est un parfum qu’on reconnait tout de suite chez ce trio finno-allemand.
    Et il convient bien à cette (…)

  • The Ultimate Dreamers - Echoing Reverie

    Le vintage années ’80 est un style qui se pratique depuis des dizaines d’années. S’il peut évidemment être pratiqué par des novices, on ne se lasse pas non plus de ceux qui ont vécu les évènements en direct. Outre les légendes Wire, il y en a d’autres qui ressurgissent du passé. Actif au milieu des années ’80, le quatuor belge est revenu aux affaires à la faveur du confinement qui les avait (…)

  • AstraSonic - Society

    Les influences, on peut les aborder frontalement ou par la bande. Dans le cas du second album du groupe belge, si les marqueurs post-punk ou cold sont bien là, ils sont déjà très processés. On vous a déjà parlé de groupes comme Ultra Sunn (et on vous reparlera de The Ultimate Dreamers) plus frontalement cold wave ou gothique, on est plutôt ici dans un pop-rock mélancolique qui lorgne du côté (…)